Pour clôturer sa saison théâtrale, Duceppe nous offre sa belle adaptation du film culte Harold et Maude. Dans une mise en scène rythmée et fort drôle d’Hugo Bélanger, le public redécouvre la relation tendre de ce couple impossible. Bel hymne à la vie.
Lui, c’est le jeunot taciturne, reclus, issu d’une famille aisée et conservatrice, fasciné par la mort, et qui meuble ses temps libres à mettre en scène son suicide de maintes façons toutes plus spectaculaires les unes que les autres. Elle, c’est la nonagénaire débordante de vie. Un esprit libre, une artiste énergique, colorée et rayonnante, et un brin délinquante. Si Harold (le très talentueux Sébastien René) et Maude (pétillante et touchante Béatrice Picard) voient les choses différemment (chez l’un, tout est noir alors que chez l’autre, c’est l’orgie de couleurs), les nouveaux amis deviendront vite inséparables et vivront une kyrielle d’expériences jusqu’à l’éclosion de leur amour singulier, mais très touchant. On verra de déployer la relation salutaire entre deux êtres attachants que tout sépare : celui qui a peur de vivre et celle qui, même à l’orée de la mort, croque dans la vie. À chacun sa façon de se battre, à chacun son arme contre le cycle de la vie.
La ribambelle de comédiens qui évoluent autour du couple mythique, notamment Danielle Lépine en mère contrôlante, Luc Bourgeois en psy ou en policier niais (désopilant), Martin Héroux en curé scandalisé devant les frasques de la vielle dame qui vole des voitures et pose nue (!), Gary Boudreault, en général d’armée, Jean-Marc Dalphond, en inspecteur revanchard et surtout Marie-Ève Trudel qui incarne les potentielles fiancées d’Harold, est parfaite. Toutes leurs interventions sont délicieuses et souvent hilarantes, particulièrement la scène où Sunshine Dorey, une comédienne excentrique, est initiée au hara-kiri.
Le rythme du spectacle est habilement maintenu au moyen d’un plateau tournant qui permet un changement de décor aussitôt presto, au gré des scènes. Des projections ponctuent aussi l’histoire, transformant les lieux et environnements tantôt en folle balade en corbillard, tantôt en luxuriante forêt ou en ciel étoilé propice aux échanges émouvants. Très réussi.
La tristesse que l’on ressent à l’issue (inévitable et prévisible) de cette idylle laisse vite place au même désir de vivre qui habitait Maude jusqu’à son dernier souffle. En quittant la salle, on a étrangement moins peur de la mort et on a envie de savourer la vie davantage. Si, si! Comme dira Maude: « La vie n’est pas éternelle. Chante la vie, comme si demain était la fin! »
La pièce Harold et Maude est présentée chez Duceppe jusqu’au 13 mai.