Le clivage zone urbaine / zone régionale à fait sa marque en 2016 par le Brexit et par l’élection américaine, opposant les « citoyens cultivés » aux « péquenots racistes » tel qu’on se plait à illustrer le phénomène. Bien que le modèle nordique social-démocrate soit inclusif, un écart s’est créé au Danemark entre les deux zones depuis le début des années 1990, rapporte le chercheur à Sciences Po Rennes, Nicolas Escach dans le Monde diplomatique d’avril 2017.
Pas de douanes, ni de barrière lorsqu’on franchit le seuil de Christiania. À se balader dans cette « commune », on se demande comment une capitale comme Copenhague peut permettre à des hippies d’occuper un terrain boisé avec cours d’eau en ville? La réponse c’est que cette ancienne base militaire n’avait pas de propriétaire et qu’elle était abandonnée, alors quand vous êtes à Christiania vous n’êtes même plus au Danemark, selon les occupants.
La région métropolitaine de Copenhague a produit 41 % de la richesse nationale en 2014, tandis que loin de la capitale la population vieillit rapidement et diminue dans l’ouest et dans le sud du pays. « Le manque d’attention des médias et du gouvernement est proportionnel aux kilomètres qui nous séparent de Copenhague. Les élus ne se préoccupent de nous que pour déménager de temps à autre une administration publique, ce qui relève de la mesure symbolique. Des fonctionnaires sont promus à des conditions très honorables, alors que beaucoup de Jutlandais perdent leur travail dans l’indifférence la plus totale », confie Thessa Jensen au chercheur Nicolas Escach.
Avec la réforme territoriale du 1er janvier 2007, l’État a ramené le nombre de communes de 271 à 98 et remplace les 14 comtés par 5 régions. Puis les compétences des municipalités ont été élargies par rapport à la santé, à l’emploi, les transports, l’environnement et plusieurs services sociaux. Cette réforme s’inscrit dans le tournant libéral des années 1980 et 1990 où les conservateurs suivis des libéraux ont adopté des réformes pour accroître la compétitivité de l’économie danoise en misant sur les territoires à forte valeur ajoutée. Plusieurs entreprises danoises privées ont tenté de relancer l’économie régionale en y implantant leur siège social et en engageant des migrants, sans offrir les mêmes égalités de traitement que l’État.
En parallèle de ce système à deux vitesses, la transition énergétique demeure la principale réussite de la convergence de l’État et des initiatives locales, souligne le chercheur Escach. Par exemple, lorsque la compagnie Danish Crown a transféré leurs activités de la petite île de Samsø vers le continent, l’ancien agriculteur et professeur en science de l’environnement a proposé aux exploitants agricoles et aux élus que l’île prenne en main sa production d’énergie par l’installation de centrales thermiques, éoliennes terrestres ou maritimes et de panneaux solaires. L’île reçoit 5000 visiteurs par année voulant s’inspirer du modèle de Samsø.
Au Danemark, le cadre juridique facilitant les démarches coopératives ou associatives a permis l’émergence de nouvelles sociétés locales autonomes dans les régions en voie de désertification, en particulier dans certaines petites îles, explique le chercheur Escach.
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