Un père torturé par le remords qui se meurt lentement d’un cancer des poumons. Un fils en colère depuis des années qui se fait malgré tout violence pour assister aux derniers moments d’une figure masculine nébuleuse. Un roman humble, mais puissant.
Deuxième effort littéraire de l’auteur Simon Roy, Owen Hopkins, Esquire, est l’histoire de Jarvis, le fils en question, qui vient assister aux ultimes journées de l’existence d’un père rongé par la maladie et les regrets. Ébranlée par la tragédie, la famille Hopkins ne s’est jamais vraiment relevée suite à la mort du jeune frère de Jarvis.
Plus d’une dizaine d’années après le divorce des parents et le départ du père, ce dernier reste nimbé d’une aura de mystère. On sait qu’il a passé du temps en prison, où il a écrit un livre qui l’a rendu célèbre. Mais jusqu’à quel point peut-on se fier à ce qu’Owen Hopkins, Esquire, raconte à longueur de journée? Ce titre auto-octroyé résume d’ailleurs l’étrangeté de la relation entre le père et le fils. Raconté selon le point de vue de l’héritier, le récit ne nomme jamais la figure paternelle autrement qu’avec l’appellation complète. Jamais de « Owen », ou même encore de « papa »… Pas même d’Owen Hopkins. Toujours cet Esquire qui s’incruste, symbole d’une distance, d’un fossé impossible à combler.
Ce pèlerinage juste avant le trépas d’Owen Hopkins, Esquire, sera l’occasion d’une tentative de recoller les pots cassés. Mais le fils est-il, au fond, vraiment différent du père? Jarvis s’interroge à savoir si sa propre vie, elle aussi sujette à des turpitudes et à une progression quelque peu chaotique, n’est en fait rien d’autre qu’une pâle copie de la vie de son paternel.
Roman portant à la réflexion sur le rôle de père et sur la puissance du deuil, Owen Hopkins, Esquire est, à toutes fins pratiques, parfaitement résumé dans son illustration de page couverture. On y voit un homme se tenant à l’intérieur de la silhouette du buste d’un deuxième individu. Comme s’il était impossible d’échapper entièrement à la force de la personnalité d’un type aussi marquant et imposant qu’Owen Hopkins. Menteur, meurtrier, écrivain, possible rock star, mais surtout père.
Owen Hopkins, Esquire, de Simon Roy, publié chez Boréal. 239 pages.