Aux grands maux, les grands remèdes: face à une incertitude qui se prolonge, dans la foulée de la pandémie de COVID-19, le secteur de la restauration demande aux principaux partis fédéraux de s’engager à renouveler et maintenir le congé de TPS sur les aliments, histoire de donner un peu d’oxygène à un secteur économique malmené.
Dans un communiqué transmis la semaine dernière, l’organisation Restaurants Canada affirme ainsi, sondage à l’appui, que « huit Canadiens sur dix (77%) souhaiteraient que le congé de TPS/TVH devienne permanent, et 84% croient que les aliments ne devraient pas être taxés ».
Ce congé de taxe temporaire avait été annoncé par le gouvernement Trudeau, vers la fin de 2024. Et selon Statistique Canada, les ventes de services alimentaires commerciaux ont bondi de 7,5% en janvier de cette année, comparativement à l’an dernier.
Et toujours selon l’agence fédérale, le secteur de la restauration aurait créé 34 600 emplois entre novembre 2024 et février 2025.
« Se nourrir est un besoin essentiel », rappelle en entrevue Maximilien Roy, vice-président fédéral et Québec de Restaurants Canada.
Voilà pourquoi, dit-il, l’organisation a réclamé la pérennisation de l’exemption de TPS pour les aliments. Cette démarche s’inscrit d’ailleurs dans la foulée des tarifs imposés par l’administration Trump aux exportations canadiennes, et des contre-tarifs déjà annoncés par le gouvernement fédéral.
Toujours selon M. Roy, l’industrie de la restauration a déjà peu de marge de manoeuvre, avec des profits de l’ordre « de 3 à 5% », dit-il.
« C’est très maigre; on doit aussi naviguer à travers une hausse de prix, en raison de l’inflation des dernières années. »
Cela expliquerait, du moins en partie, comme l’indique le communiqué de Restaurants Canada, que « 53% des entreprises de restauration déclarent fonctionner à perte, ou atteindre tout juste le seul de rentabilité, contre 12% avant la pandémie ».
« L’imposition de nouveaux tarifs par l’administration Trump pourrait avoir un impact dévastateur sur les restaurants; pour nous, si on enlève la TPS, ça offre une petite marge de manoeuvre pour que nos restaurants puissent continuer à fonctionner et garder nos emplois », a encore déclaré Maximilien Roy, en entrevue.
« L’autre impact, qui est indirect, c’est la confiance du consommateur: lorsqu’il y a de l’incertitude dans l’air, la première chose qu’une personne va faire, c’est réévaluer ses dépenses pour acheter de façon plus judicieuse. Cela veut souvent dire couper dans les sorties au restaurant ou la commande de nourriture. »
M. Roy reconnaît que le retrait de la TPS sur les aliments « aurait un coût, pour le gouvernement, mais cela permettrait d’augmenter la confiance des consommateurs, continuer à faire rouler l’économie, et donc diminuer l’impact d’un ralentissement économique ».
« Pas encore de signal clair »
Dans le cadre de la campagne électorale, Restaurants Canada a donc contacté les principaux partis fédéraux pour tenter de s’assurer de leur appui à cette exemption de TPS. Mais lors de l’entrevue, la semaine dernière, rien n’était encore gagné.
« On n’a pas encore un signal totalement clair, mais on sent qu’il y a un certain intérêt », indique ainsi M. Roy. « Le Nouveau Parti démocratique (NPD) a ainsi inclus, dans sa plateforme, son intention d’enlever la TPS sur les mets préparés; ils ne vont pas aussi loin que de parler des mets préparés au restaurant, ils parlent de ceux qui sont vendus en épicerie, mais nous continuons de faire pression. Ce serait une question d’équité entre les restaurants et les épiceries. »
Le hic, c’est que le NPD est loin, très loin dans les intentions de vote, derrière les libéraux et les conservateurs. Et pour l’instant, Restaurants Canada n’a pas encore eu de réponse de la part de l’équipe de Mark Carney, ou encore de celle de Pierre Poilievre.
« Ceci dit, ce que nous entendons, c’est que l’abordabilité est un enjeu prioritaire dans le cadre de cette campagne. On ne sait pas s’ils vont aller de l’avant, ou non [avec notre proposition]. On se croise les doigts pour avoir une réponse au cours des prochains jours », mentionne Maximilien Roy.
Selon ce dernier, même sans tarifs douaniers et guerre commerciale avec les États-Unis, la situation économique, dans le secteur de la restauration, serait au mieux stable, avec une croissance quasi nulle.
« Pour l’instant, en 2025, c’est encore très difficile; on parle d’une baisse des ventes de plus de 7%. On sent que les gens sont inquiets, et décident d’aller moins souvent au restaurant. »