Madou Sidiki Diabaté porte en lui le même don à la kora que son frère cadet, le regretté Toumani Diabaté, disparu le 19 juillet 2024. Il sera l’un des maîtres griots du Mali invités par les Productions Nuits d’Afrique pour célébrer, le 14 février, le Mois de l’histoire des Noirs au Gesù. L’artiste s’exprime sur le sens de cette célébration, l’ascendance africaine mandingue et sa harpe africaine, porteuse d’un legs mythique de 700 ans.
Que signifie pour vous ce concert pour le Mois de l’histoire des Noirs?
Il s’agit d’abord d’un grand honneur, car je suis Africain, Noir, mais surtout un Malien qui vient d’un pays historique, le Mali et sa culture ancestrale mandingue. En tant que griot, cela fait 700 ans que ma lignée et ses traditions sont préservées pour célébrer la vie et agir en tant que messager du peuple. Le griot a toujours été comme un journaliste, celui qui diffuse les informations du moment et cela est toujours d’actualité…
Est-ce que vous allez exprimer un message ou un plaidoyer pour les droits des afro-descendants, pour le Mali?
Ma forme de revendication comme griot passe par un rappel aux gens de nos cultures africaines et de nos origines, l’âme qui nous lie. Je me considère premier messager du Mandingue et j’en appelle à notre culture avant tout. Aujourd’hui, on ne peut pas nous arracher la culture, elle est ce qu’il nous reste dans un monde d’affrontements économiques et politiques.
Et cet hommage à votre frère Toumani, à quoi peut-on s’attendre?
Le concert est très spécial, il se veut solennel plutôt que dans l’émotion du regret de sa perte. Toumani a tout donné à la culture mandingue et a ouvert la kora au monde entier. Il a créé tant de joie par son art et cela sera recréé dans le concert. Il a été mon ami, mon professeur et grand frère en un tout. Je revisiterai bien sûr quelques-unes des pièces de son vaste répertoire.
Quelle place occupe la kora en Occident, où le chaos et l’anxiété politique sont omniprésents?
La kora a toujours été là et va rester, car c’est un instrument qui diffère de tous les autres instruments; elle est au cœur de tous les grands moments de la vie. On peut l’écouter dans toutes les circonstances. Elle a une place pour tous les messages et sert à apaiser, donner la force mieux travailler, aller de l’avant. Tel a été son rôle depuis la nuit des temps autour des guerriers. C’est un instrument qui parle une langue universelle, et se joue dans toutes les musiques, on la sollicite de plus en plus.
Et que vous réserve les prochains mois?
Depuis le décès de Toumani, j’ai offert un concert spécial en sa mémoire à l’Institut français de Bamako et je vais continuer à faire des concerts en son hommage. Je m’apprête à faire une grande tournée en Amérique latine et retrouverai le chanteur Salif Keïta avec qui je partage la scène depuis 2013. Je veux aussi organiser un festival au Mali pour fêter l’année 2025 proclamée année de la culture au Mali.
Des Racines et des Rythmes
Hommage à Toumani Diabaté par Madou Sidiki Diabaté
14 février à 20h, au Gesù