Ça commence par des babillages et des cris, des tentatives de maîtriser les mots et le monde. Ça se termine avec des tentatives pour ne pas oublier les mots qui ont donné du sens à toute notre vie.
Ça, c’est Tout ça, une pièce d’Alistair McDowall, traduite par Fanny Britt et mise en scène par Louis-Karl Tremblay, dont la première avait lieu le 22 janvier, au Théâtre de Quat’Sous.
C’est dans une salle comble, au public excité et fébrile qu’il nous a été donné de voir, d’entendre et surtout d’apprécier la performance hors du commun d’Évelyne Rompré.
En fait, ça commence avant même les babillages, car la mise en scène nous place d’abord dans l’environnement sonore et visuel qui entoure le bébé à naître: battements de cœur, sons liquides du placenta et noirceur totale.
Ce personnage est seul, mais il n’est pas unique. Un peu comme Albertine en cinq temps, ce bébé devient enfant, adolescente, femme, mère, et grand-mère. Tout au long de la pièce, elle se fait la conversation à elle-même, mais dialogue aussi avec les femmes importantes de sa vie, comme sa meilleure amie, sa mère, sa fille.
Le texte est souvent mitraillé et ne demande pas seulement une bonne mémoire mais aussi beaucoup de souffle. Bon, l’entrée en matière de l’enfant avec ses cris et ses répétitions aurait gagné à être coupée au moins de moitié. Mais, une fois rendue dans l’enfance, l’héroïne atteint nos cœurs, nous trouble et nous fait sourire. Dans un décor et un costume intemporels signés Karine Galarneau, on voit évoluer cet être qui dit les vraies choses, des choses parfois gênantes mais tellement nécessaires. Le sexe, l’amour, les relations familiales et filiales, le travail, la mort, tout est passé à la moulinette mais avec une touche de tendresse et une bonne dose de regrets: « J’aurais voulu prendre soin de toi mon frère ».
Au son d’une musique de circonstance (Antoine Bédard) et sous des éclairages (Robin Kittel-Ouimet) subtils, mais très efficaces, Évelyne Rompré casse la baraque. Courez la voir jusqu’au 15 février.