Entre Dan et Alice, entre Dan et Anna, entre Anna et Larry, entre Alice et Larry… Dans ce qui pourrait être catégorisé comme un carré amoureux, ou du moins une série de triangles romantiques et sexuels, Contre toi, présentée sur les planches de Duceppe, quatre protagonistes iront de relation en relation, bien souvent sans but précis, épris d’un amour bien souvent confondu avec le désir.
Écrit par Patrick Marber et traduit par Fanny Britt, le texte de cette oeuvre est décliné avec un rythme rapide, parfois quasiment effrené. Nos personnages vont parfois jusqu’à se mitrailler de répliques, qu’il s’agisse de se déclarer son désir ou son amour, de se crier des bêtises par la tête, ou, bien souvent, un mélange des deux à la fois.
Car Dan, jouée par Isabelle Blais, semble incapable de ne pas flirter, voire de ne pas glisser vers le territoire moralement très douteux de l’adultère. Que recherche-t-elle, au fait? Pourquoi est-elle incapable de ne pas tromper sa partenaire, de ne pas penser à la suite des choses? La voilà qui tombe amoureuse d’Anna, une photographe, mais qui va aussi, sans trop y penser, jeter cette dernière dans les bras de Larry.
Pendant deux heures, sur scène, et sur une période de nombreuses années, dans la pièce, nos quatre comparses vont tour à tour se désirer, s’aimer, se détester, se laisser…
On cherche certainement, à travers ces tempêtes amoureuses et sexuelles, à transmettre un message; peut-être un message sur la nature des relations humaines, sur la fragilité des sentiments, sur l’hypocrisie morale, sur la force de la tentation… Et ce message, régulièrement agrémenté de remarques assassines qui font s’esclaffer de rire dans la salle, est largement constant et clair.
Cela étant dit, on ne peut s’empêcher de trouver que les personnages, à toujours revenir les uns vers les autres, se tirent eux-mêmes dans le pied. On comprend l’intérêt de ce genre de huis clos émotionnel et sexuel, mais à quel point sommes-nous prêts à demeurer dans des relations toxiques? À quel point sommes-nous prêts à souffrir au nom du désir, ou de ce que l’on appelle l’amour?
On se demande aussi, au fil des échanges, ce qui se cache chez nos différents personnages. Car au-delà des sentiments et du désir qu’ils ont l’un pour l’autre, ces quatre protagonistes ont des allures de feuille vierge, comme si la vie, les rêves, rien de tout cela n’existait au-delà des émotions et des envies.
Malgré tout, on apprécie grandement le jeu des quatre interprètes, Isabelle Blais, David Boutin, Inès Defossé et Alice Pascual, qui virevoltent à travers les magnifiques gigantesques pièces amovibles du décor. Et si la réflexion sociologique et philosophique de Contre toi est incomplète, il s’agit tout de même d’un fort agréable moment de théâtre.
Contre toi, de Patrick Marber, selon une traduction de Fanny Britt et dans une mise en scène de Solène Paré
Avec Isabelle Blais, David Boutin, Inès Defossé et Alice Pascual
Chez Duceppe, jusqu’au 15 février