Avant la COVID, un contenu « antivaccin » provoquait 11 fois plus d’engagements sur les réseaux sociaux qu’un contenu « provaccin ». De quoi questionner sur les retards communicationnels qu’il faut combler pour corriger ce déséquilibre.
C’est le constat que posent les deux auteurs d’une étude italienne portant sur les contenus publiés autour du « débat italien sur les vaccins » entre 2016 et 2021 sur quatre plateformes (Facebook, Instagram, Twitter et YouTube). Leur recherche couvre donc quatre années de la période pré-COVID, des années pendant lesquelles des observateurs avaient déjà commencé à noter une croissance importante des contenus antivaccins sur les réseaux sociaux: les auteurs de ces fausses informations étaient notoirement mieux organisés et mieux coordonnés que les scientifiques, ou les médecins, ou les médias, qui s’efforçaient dans le même temps de publier de l’information fiable.
Juste avant la COVID, détaillent les chercheurs du Centre de recherche Enrico Fermi, environ un tiers des contenus reliés aux vaccins sur ces quatre réseaux sociaux étaient de la mésinformation (c’est-à-dire des contenus, faux ou trompeurs, dont on ne peut pas démontrer qu’ils ont été produits avec l’intention de nuire). Sur Facebook, c’était la moitié.
Ces informations fausses ou trompeuses « semblent remplir une partie des vides informationnels laissés par les fournisseurs professionnels d’information », lit-on dans cette recherche, parue le 15 janvier dans la revue Public Library of Science One. Et ces informations fausses ou trompeuses symbolisent une façon différente de rejoindre l’usager des réseaux sociaux, en jouant la carte de l’émotion.
Le bon côté de la COVID, c’est qu’elle a provoqué un sursaut d’intérêt pour les vaccins dans les médias traditionnels, « à un niveau jamais vu », faisant augmenter la proportion d’informations fiables. Mais cela révèle aussi l’existence du « vide informationnel » autour des vaccins, en-dehors d’une année pandémique.
En théorie, il faudrait que les sources fiables réussissent elles aussi à créer cet « engagement » (celui qui se traduit, sur les réseaux sociaux, par des « j’aime » et des « partages »). Concrètement, concluent Emanuele Brugnoli et Marco Delmastro, « nos recherches soulignent l’importance de maintenir une couverture [journalistique] provaccin cohérente et complète », en essayant de cibler les sujets où le risque est élevé de voir la dissémination de mésinformation avoir des impacts négatifs ».