On en parle depuis près de 20 ans — même si des complotistes ont soudain découvert le mot en 2024 — mais les expériences de géoingénierie ne sont jamais allées très loin. En 2025, davantage de projets sont planifiés, et avec eux, vont venir des controverses: faut-il continuer dans cette direction ou non?
« Géoingénierie » est un terme très large qui réfère à toutes sortes d’idées ou de concepts visant à jongler avec les climats de la planète. Dans presque tous les cas, ce sont des idées qui n’existent que sur le plan théorique. Une exception: l’ensemencement des nuages pour provoquer la pluie, une technique qui est testée depuis des décennies, mais dont l’efficacité est encore très limitée.
Ces dernières années, c’est surtout dans un objectif d’atténuer le réchauffement climatique qu’on en parle : en théorie, si on répandait des tonnes de dioxyde de soufre dans la haute atmosphère ou qu’on déversait des tonnes d’hydroxyde de magnésium dans l’eau, on pourrait retarder la hausse mondiale des températures, dans un cas en réduisant la quantité de rayons du Soleil qui atteignent le sol, dans l’autre, en absorbant une plus grande quantité de carbone dans les océans.
Nombreuses incertitudes
Mais il s’agit bien de théories, puisque pour mettre ces idées en pratique, il faudrait des tests à très grande échelle, avec des conséquences imprévisibles : est-ce que ça augmente la pluie dans un endroit et la réduit ailleurs? Si on déverse tout cela dans l’océan, n’affecte-t-on pas les écosystèmes? C’est pourquoi, depuis près de 20 ans, autant les écologistes que les scientifiques qui se sont prononcés là-dessus ont enjoint la plus grande prudence avant de faire de telles expériences.
Mais l’accélération des dégâts causés par les changements climatiques amène davantage de gens à vouloir en parler. En octobre, l’Union géophysique américaine a publié un guide des pratiques éthiques à suivre pour quiconque voudrait faire ce que l’association appelle de « l’intervention sur le climat ». Le New Scientist notait en décembre que des dizaines d’études ont été publiées en 2024 —uniquement des modélisations informatiques de différentes méthodes possibles, mais qui dénotent un intérêt pour la question.
En mai prochain, Le Cap, capitale de l’Afrique du Sud, accueille un congrès sur la « géoingénierie solaire » (SRM), soit l’idée de limiter la quantité de rayons du Soleil qui atteignent le sol. Avec un intérêt particulier pour les pays en voie de développement, justifient les organisateurs : « si la SRM permet de réduire les risques climatiques, ce sont les pays les plus vulnérables aux changements climatiques qui auront le plus à gagner ».
Au Royaume-Uni, une jeune agence gouvernementale (Advanced Research and Invention Agency) créée pour encourager le développement de technologies innovantes, doit dévoiler cette année les premiers gagnants d’un concours de subventions appelé « Explorer des options pour refroidir activement la Terre » (Exploring Options for Actively Cooling the Earth), qui pourrait inclure des expériences à petite échelle sur le terrain (et non uniquement des modélisations informatiques). Le concours est doté d’un budget de 50 millions de £ (plus de 60 millions$ US).
Aux États-Unis, une expérience sous l’aile de l’Institut océanographique Woods Hole (Massachusetts) qui devait avoir lieu en 2024 près des côtes, a été repoussée à 2025. Parmi les commentaires recueillis par l’Agence de protection de l’environnement en vue d’approuver cette expérience, on remarquait des gens qui étaient fermement opposés en invoquant les risques posés par le climat, et d’autres qui étaient fermement en faveur… en invoquant les risques posés par le climat.