Il faudra un certain temps pour commencer à comprendre – et apprécier – Preparations for a Miracle, le film d’ouverture de l’édition 2024 des Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM). Et pourtant, ce film de Tobias Nölle, qui atteint la durée « idéale » de 90 minutes bien tassées, tient franchement du tour de force, avec une impressionnante profondeur sous un extérieur déconcertant.
Nous sommes dans le corps d’une machine venue du futur; enfin, c’est ce que l’on veut nous faire croire, la caméra adoptant régulièrement le point de vue d’un individu qui erre quelque part en Allemagne, entre forêts et terres industrialisées, entre fragments de nature et zones exploitées en quasi-totalité.
Et à la frontière de ce clash entre ce qu’il reste de l’environnement et ces paysages lunaires, stériles, d’apparence tout ce qu’il y a de plus artificiel, notre protagoniste, notre androïde, cherche à parler au Roi, en prévision du Miracle. Rien de moins.
Quel roi? Quel miracle? On reçoit quelques précisions ici et là, alors que notre personnage principal s’approche peu à peu de chantiers de construction, ou encore de zones promises à la destruction où persistent et signent des militants environnementaux, pour s’approcher de divers engins mécaniques, titans de métal aussi humains qu’extraterrestres.
L’objectif? Rencontrer ce fameux roi, qui semble savoir se faire désirer. Et à mesure que notre protagoniste poursuit sa quête, on rencontre des machines de plus en plus grandes, de plus en plus puissantes, toujours pilotées par des humains en chair et en os, bien sûr, mais semblant aussi avoir une vie propre.
Avec des images parfois magnifiques, parfois terrifiantes, et parfois magnifiquement terrifiantes, Tobias Nölle semble capter cet affrontement qui ne semble pas avoir de fin: celui d’une humanité désireuse de protéger ce qu’il lui reste, mais souhaitant également assurer la production de suffisamment d’énergie, l’extraction de suffisamment de ressources pour faire fonctionner sa civilisation, elle aussi basée sur des machines.
Des machines détruisant les écosystèmes pour alimenter d’autres machines, qui produiront de plus petites machines que nous iront chercher à bord de nos propres machines mobiles…
Doux-amer, proposition dont le plaisir croît avec l’usage – en quelque sorte –, superbement tourné, Preparations for a Miracle méritait pleinement d’ouvrir l’actuelle édition des RIDM. Un documentaire engagé, certes, mais aussi capable de prendre un pas de recul. Une oeuvre plus que nécessaire, y compris pour son approche très « science-fictionnesque ».