À l’instar de la fête qu’elle tente de célébrer, l’équipe derrière Le cyclone de Noël, long-métrage dérivé de la populaire série télé L’oeil du cyclone qui a déjà quatre saisons (et une à venir) au compteur, peine à montrer son enthousiasme derrière une tentative purement capitaliste de faire de l’argent, plutôt que de plaire aux amateurs ou en convaincre de nouveaux.
Le passage du petit au grand écran, peu importe les circonstances, n’est pas toujours facile. Si ce dernier peut prendre plusieurs formes, ici, il s’agit d’un exercice plutôt singulier. Ni suite (quoique ceux qui ne sont pas à jour dans la série et/ou qui ne connaissent aucunement l’univers risquent à la fois d’être déboussolés et étourdis, compte tenu d’éléments qui n’existaient pas dans les premières saisons, tout comme de l’absence totale de mise en contexte de qui que ce soit), ni film si indépendant que ça, ni rien de bien particulier finalement, on se demande encore, tout comme lorsqu’on l’a annoncé, pourquoi ce projet existe.
Certes, sur papier, cela relève presque de l’évidence. Avec une popularité qui n’est plus à ignorer, cette sitcom québécoise, qui devait au départ mettre en vedette Julie LeBreton, s’est taillé une place sérieuse dans le coeur des téléspectateurs d’ici.
Pourtant, oser un film d’une durée de plus de quatre épisodes habituels qui prend l’affiche en salle, plutôt qu’un simple téléfilm de début de soirée, ou encore d’un épisode allongé qui joue dans la période appropriée, serait une décision ambitieuse si sa sortie en plein début du mois de novembre n’était pas encore la démonstration à peine camouflée d’essayer de mousser un peu les coffres avant de déposer le tout, durant le temps des Fêtes, sur la plate-forme numérique payante de Radio-Canada.
Bien sûr, on pourrait croire que c’est arrangé avec le gars de vue, comme la grande morale semble scander: l’important ce n’est pas la date, mais bien les liens qui nous unissent.
Sauf que l’exercice est trop futile pour croire que ce soit réellement volontaire rendu là. On est également encore bien moins certain que l’affection des spectateurs québécois pour cette série, quand vient le temps de relaxer après une longue journée, soit suffisante pour les pousser à se ruer dans les salles sombres.
Malgré tout, si presque toute l’équipe est de la partie, on constate, à notre grande surprise, que, pour un premier essai au long-métrage, la réalisation d’Alain Chicoine est plus cinématographique qu’attendu, tout comme le scénario de Dominic Anctil, Marie-Élène Grégoire et Louis-Philippe Rivard, trois des très nombreux collaborateurs aux scénarios de la télésérie qui est habituellement une succession de sketchs.
De fait, l’histoire se tient et, mis à part quelques regards directement lancés à la caméra, on brise rarement le quatrième mur, la signature la plus distinctive de la télésérie.
Cela n’empêche tout de même pas Christine Beaulieu de s’y donner à coeur joie dans ce rôle de mère aimante, attachante et imparfaite, qui déroge beaucoup des rôles qu’on a davantage l’habitude de lui donner. Dommage, par contre, que, dans cette espèce de Christmas with the Kranks ou de Grinch inversé, on se retrouve avec une prémisse qui pue l’égoïsme à plein nez.
En effet, dans un désir de perpétuer les traditions, Isabelle, notre protagoniste, est prête à tout (vraiment tout) pour fêter Noël en famille, alors que tout le monde s’est prévu des plans aguichants chacun de son côté.
Avec le budget de KOTV, de celui de la compagnie Les films Opale, sans oublier Radio-Canada et on en passe, on se serait quand même attendu à un résultat avec plus d’envergure que de retrouver presque tous les décors habituels, mais filmés différemment. Constat décevant, puisqu’on ne tire jamais vraiment profit des possibilités d’un tel scénario et qu’on se retrouve avec des revirements qui manquent de relief et de folie (on aurait pris plus de gags comme celui, trop court, de la permanente). Même la création d’un fort, en écho à La guerre des tuques, sera filmé de manière peu inspirée.
Pire, les rares apparitions qui prennent la place de personnages secondaires, qu’on a évacué du long-métrage, manquent de piquant. Comme cette apparition surprise en guise de finale qui se révèle être plutôt fade, quand on la compare à celle, gardée secrète jusqu’à sa diffusion, qui terminait le classique épisode spécial Noël chez les Paré de La petite vie.
Il en va de même pour la présence plutôt inutile de Dominic Paquet dans un rôle dont on aurait pu se passer, alors qu’on regrette d’avoir fait appel à la grande Louise Portal dans un rôle inédit à la télésérie pour finalement si peu.
Au moins, on se console en retrouvant l’énergie habituelle et contagieuse de la distribution, dont la chimie n’est plus à prouver. Véronique Cloutier est plus à l’aise que jamais (même si on la fait chanter, comme dans Les dangereux), Patrick Hivon a toujours énormément de plaisir quand on lui permet de faire de la comédie (on repense à sa performance survoltée dans Émilie) même si à ses côtés la pétillante Catherine Souffron est à nouveau sous-utilisée et les enfants font du mieux qu’ils peuvent avec le matériel qu’on leur laisse à jouer. Pour rehausser la sauce, forts d’un sens de la répartie à toute épreuve, les vétérans Luc Senay et Danielle Proulx font rire pratiquement à chaque apparition.
C’est au final le plaisir évident des interprètes qui aide à faire passer le temps plus vite et fait pardonner le visuel fade de l’ensemble, qui continue de prouver qu’on ne semble pas en mesure de recréer la magie des Fêtes au grand écran.
De Merci pour tout à 23 décembre (dans les exemples plus récents), Le Cyclone de Noël continue de démontrer qu’on n’a toujours pas percé le mystère de ce genre cinématographique très précis qui rapporte pourtant habituellement gros de l’autre côté de la frontière. Comme quoi on ne risque pas, nous non plus, de changer nos habitudes face à cet univers et on préférera attendre que le tout arrive dans le confort de notre salon pour s’y attarder.
4/10
Le cyclone de Noël prend l’affiche en salle ce vendredi 8 novembre. Il arrivera ensuite dans la section VERO.TV de ICI TOU.TV Extra dans une date qui reste à déterminer.