La tendance se maintient: même si les présidentielles se gagnent avec un Grand Électeur par ci, un autre par là, donnant lieu à des disparités parfois extrêmes entre le nombre total de votes recueilli, par chacun des candidats des Partis républicain et démocrate, et l’allégeance politique du locataire de la Maison-Blanche, les Américains, eux, n’en démordent pas et veulent jeter le Collège électoral aux orties.
Selon un nouveau coup de sonde réalisé par le Pew Research Center, pas moins de 63% des Américains souhaitent que la présidentielle se joue selon le scrutin universel, c’est-à-dire que le candidat ayant obtenu le plus de votes à l’échelle du pays l’emporte.
Actuellement, le Collège électoral attribue 538 Grands Électeurs qui sont répartis entre les candidats selon si ceux-ci ont obtenu, ou non, la majorité des voix dans un État donné – avec certaines exceptions et précisions. Pour remporter la présidentielle et devenir chef de l’État, il faut gagner au moins 270 de ces votes au Collège.
Cette structure accorde ainsi une importance disproportionnée à certains États de petite taille, et il suffit parfois d’un seul État, comme pour la Floride, en 2000, pour décider du sort de la nation entière. Ou, dans le cas des élections de 2016 et 2020, quelques dizaines de milliers de voix ont fait la différence entre Hilary Clinton et Donald Trump, ou encore entre ce dernier et Joe Biden.
Toujours selon les résultats du sondage, à peine un peu plus du tiers (35%) des personnes interrogées souhaitent conserver ce système complexe.
Données à l’appui, les spécialistes du Pew Research Center soutiennent que plus d’une majorité d’Américains souhaitent la fin de cette méthode électorale, et ce, depuis bientôt un quart de siècle. En fait, avec 63% d’appuis en 2024, cette mise au ban est à peine un peu plus populaire qu’en 2000, où 61% des participants favorisaient cette même solution.
Un mouvement stable
Ombre au tableau, toutefois: si les avis favorables à une réforme n’ont jamais chuté sous les 51%, pendant cette période, ils n’ont jamais, non plus, dépassé les 65%. Et le seul moment où les partisans du maintien du système ont failli être majoritaire est peu après l’élection présidentielle de 2016, décidée en faveur de Donald Trump par quelques dizaines de milliers de voix dans une poignée d’États, alors que son adversaire démocrate a obtenu des millions de voix en plus, à l’échelle du pays.
Comme dans bien d’autres domaines liés à la politique américaine, les avis divergent de façon importante en fonction de l’allégeance des répondants. Ainsi, 80% des démocrates et des indépendants pro-Parti démocrate ayant participé à l’enquête sont favorables au remplacement du Collège électoral par un système fonctionnant selon le vote populaire.
De leur côté, les répondants républicains et indépendants pro-Parti républicain sont davantage divisés: 53% d’entre eux souhaitent le maintien du système actuel, contre 46% qui veulent le remplacer. La proportion de républicains partisans du statu quo est toutefois en baisse depuis 2016, alors qu’ils étaient 69% à être de ce même avis.
Au fil des ans, plusieurs tentatives ont eu lieu pour réformer le Collège électoral, voire l’abolir complètement. Aucune n’a jusqu’ici été couronnée de succès. En date d’avril de cette année, toutefois, 17 États et le District de Columbia ont rejoint une coalition visant à ce que les votes du Collège de chaque État soient accordés au vainqueur du vote populaire national. Ce groupe représente 77% des 270 votes nécessaires pour que ce changement entre en vigueur.
Certains experts affirment toutefois qu’agir sans l’accord du Congrès pourrait aller à l’encontre de la Constitution. Et puisque le vote populaire favorise les démocrates – les États démocrates étant plus populeux que les États républicains –, il y a fort à parier que les élus républicains du Congrès s’opposeront à toute réforme qui pourrait leur nuire sur le plan politique.