Notre propre code génétique serait l’un des principaux facteurs guidant notre éventuelle réussite scolaire. C’est du moins ce qu’avancent des chercheurs de l’Université de York, qui réclament que l’on porte davantage attention au rôle joué par l’ADN dans la formation académique, alors que les progrès en matière d’analyse d’ADN permettent de tracer un portrait plus clair.
Ces travaux ont été publiés dans Educational Psychology Review.
En effectuant une métanalyse de diverses études s’intéressant aux liens entre les gênes et l’éducation, les chercheurs ont constaté que jusqu’à 25% des différences en matière de résultats scolaires, entre les individus, peuvent être attribuées à des différences génétiques.
Cet effet serait donc plus important que l’impact du milieu socioéconomique du ménage (10%) et du classement de l’école à laquelle l’enfant est inscrit, ce qui ne compterait que pour 4% du succès académique.
Par ailleurs, la méta-étude aurait permis d’établir que même de petites différences dans la facilité génétique d’une personne pour l’apprentissage les rend plus propices à consacrer une année de plus à des cours. Ce qui, au Royaume-Uni, pays où a été réalisée l’étude, pourrait dire d’aller obtenir une maîtrise.
Les conclusions, écrivent les auteurs de l’étude, suscitent des questionnements à propos de la possibilité que des tests génétiques soient un jour utilisés pour identifier et soutenir les enfants plus à risque d’éprouver des problèmes d’apprentissage.
Valeurs éthiques et sociales
« S’il reste encore beaucoup de travail à accomplir avant que nous puissions prédire à quel point des enfants seront en mesure d’être performants à l’école, nous espérons que nos travaux déclencheront des discussions à propos du potentiel de prédiction des risques de mauvais résultats scolaires », a déclaré la principale autrice de l’étude, Kirsty Wilding.
« Ces discussions doivent tenir compte non seulement de critères scientifiques, mais aussi de valeurs éthiques et sociales », a renchéri la professeure Sophie von Stumm, qui a également collaboré à l’étude.
« Il est compréhensible que bien des gens craignent que des tests génétiques n’entraînent de la discrimination. Voilà pourquoi nous devons nous assurer que nos encadrons comment les recherches, dans ce domaine, sont effectuées et comment leurs résultats communiqués. »
Toujours selon Mme Wilding, « la propension génétique d’un enfant pour l’éducation ne veut pas dire que ses caractéristiques ou habiletés sont coulées dans le béton, elle indique seulement une tendance génétique ou une probabilité de penser, ressentir et agir de certaines façons ».
« Des environnements familial et scolaire positifs ont un impact à long terme important sur les résultats d’un enfant et ses perspectives d’avenir, et la composition génétique d’un individu ne devrait jamais être utilisée pour classer quelqu’un comme étant destiné à échouer. »
Les chercheurs ont aussi mis de l’avant le fait que les influences génétiques sont à leur tour affectées par des « corrélations entre les gènes et l’environnement ».
« Les individus sélectionnent, s’adaptent à et modifient leurs environnements pour correspondre à leur génotype », a encore mentionné Mme Wilding.
« Par exemple, les gens ayant une tendance génétique à la lecture pourraient passer leur temps libre à la bibliothèque. Ce qui vient ensuite améliorer leurs capacités de lecture. Alors, les influences génétiques et environnementales s’équilibrent, et certains environnements sont nécessaires pour permettre aux tendances génétiques de s’exprimer. »
Pointage polygénique
La relation entre la génétique et les résultats académiques est évaluée via un pointage polygénique, soit une méthode statistique qui additionne les effets des variations de l’ADN.
Ces pointages sont obtenus dans le cadre de vastes études qui examinent l’ADN de millions de personnes. Ces recherches se penchent sur des variations génétiques spécifiques, qui sont partagées par des gens possédant une caractéristique commune.
Pour identifier les variations associées au niveau d’éducation, les chercheurs ont comparé l’ADN de gens ayant une vaste gamme de qualifications académiques, allant de ceux qui n’ont pas terminé l’instruction obligatoire à ceux qui possèdent un doctorat.
Les scientifiques ont ensuite identifié quelles variantes de l’ADN sont répandues aux deux extrémités de ce spectre scolaire. En dénombrant combien une personne possède de ces variations génétiques, il est possible d’attribuer un « score » qui permet de prédire le succès dans les études.
Les chercheurs reconnaissent toutefois des limites à leur processus, notamment le fait que pour l’instant, 80% des scores polygéniques s’appuient sur des personnes de descendance européenne.
« Il est nécessaire d’accroître la diversité génétique des participants à ce genre d’études », soutient la Pre Von Stumm.
« Les marqueurs génétiques varient chez différents groupes ethniques, et les scores polygéniques ne peuvent s’appliquer à tous.