Après les chefs-d’oeuvre que furent Alien et Aliens, respectivement sortis en 1979 et 1986, il s’écoula encore six ans avant que les amateurs de la franchise n’aient droit à une suite. Et ladite suite, baptisée de façon très originale Alien 3 (ou Alien au cube, selon le visuel « officiel »), allait inaugurer l’ère des erreurs, des faux pas, des décisions étranges dans cet univers de science-fiction. Une période qui se poursuit encore, quelque 32 ans plus tard.
Mais Alien 3, pour tous ses défauts, comporte aussi beaucoup d’aspects positifs, et même de ce qui pourrait passer pour des coups de génie. Pour la petite histoire, à la fin d’Aliens, le personnage d’Ellen Ripley, joué par Sigourney Weaver, réussit à vaincre la reine extraterrestre et s’endort avec tous les survivants du film dans des sarcophages, en vue d’un éventuel retour sur Terre.
Bien entendu, les choses ne peuvent pas bien se passer; nous sommes devant un film de la série Alien, après tout! Et donc, en plein générique d’ouverture, on apprend qu’un face hugger, ces « crabes » capables d’infecter un hôte et d’y implanter une larve de xénomorphe, a attaqué l’un des passagers, provoquant au passage un incendie dans le compartiment, et forçant dont l’éjection de celui-ci.
Nos protagonistes vont ainsi s’écraser sur Fury-161, une planète faisant à la fois office d’usine métallurgique et de prison à haute sécurité. Du même souffle, tous les passagers périssent, à l’exception de Ripley, sauvée in extremis après la catastrophe.
Ce qu’elle découvre, c’est une colonie pénitentiaire largement désertée, les prisonniers ayant tous été évacués, à l’exception d’un petit groupe de 25 agissants comme des pseudo-concierges. Ou s’agit-il plutôt de pauvres âmes condamnées à purger leur peine en enfer?
Le nom de Fury-161 est effectivement tout à fait approprié: sous un ciel en apparence toujours nuageux, des vents déchaînés s’engouffrent lugubrement à l’intérieur de dizaines, voire de centaines de structures industrielles abandonnées.
Et donc, dans ce petit groupe de meurtriers, de violeurs, de criminels cruels qui semblent chercher la rédemption du côté de la religion, débarque Ripley, d’abord une femme dans un monde exclusivement composé d’hommes, mais aussi un autre de nos amis extraterrestres.
Ledit xénomorphe commencera bien entendu à dévorer tout ce qui bouge, attaquant les détenus les uns après les autres, semant la terreur parmi cette population carcérale, dans des installations où les armes les plus sophistiquées sont des haches.
Face à un ennemi en apparence intuable, il est facile d’imaginer que le xénomorphe représente la vengeance divine pour les crimes commis par ces prisonniers.
Le fardeau de la franchise
Alien 3 est, ne l’oublions pas, le premier long-métrage du réalisateur David Fincher, qui allait ensuite proposer un tout petit film nommé Seven. Mais aussi The Game, Fight Club et bien d’autres grands succès qui ont cimenté son talent comme cinéaste.
Et déjà, dans ce premier film, on voit les influences qui guident Fincher. L’atmosphère oppressante, le mal-être des personnages, les angles de caméra, le grain de l’image…
Mais autant Fincher est quelqu’un de très doué, autant c’est cette idée même du xénomorphe qui vient saper les forces vives de l’oeuvre. Car on sait déjà ce que le monstre peut accomplir. On se doute bien que les prisonniers seront tués un à un. Et que nos protagonistes réussiront, peut-être, à s’en tirer une nouvelle fois. Même si le film change quelque peu la donne en ce sens, d’ailleurs.
Et puisqu’il nous faut une structure traditionnelle, pas question de vraiment prendre les spectateurs par surprise. On a plutôt droit, malgré les magnifiques décors extérieurs, à de multiples scènes dans des corridors ternes et ennuyeux. Avec un rythme qui n’est jamais assez maintenu pour que l’on soit vraiment stressés par la possibilité que le monstre surgisse au détour d’un corridor.
Parlons-en, d’ailleurs, du monstre: finis les costumes des deux premiers films. On a plutôt choisi d’aller de l’avant avec de l’animation par ordinateur. En 1992. Le résultat est atroce, d’autant plus que le xénomorphe ressemble davantage à un chien qu’à la bête terrifiante des deux premiers volets. Et ne parlons pas de cette fin, qui s’éternise juste assez pour gâcher le plaisir. D’autant plus que la dernière scène consiste en du texte que l’on fait dérouler sur un écran.
Bref, si David Fincher ne s’en est pas si mal tiré, et si Alien 3 est probablement l’un des seuls films de la série à explorer la question de la religion et de la rédemption dans un contexte de colonisation de l’espace, ce long-métrage ne parvient pas à garder le cap sans perdre de sa superbe. Une oeuvre incomplète, bref. Ou plutôt une oeuvre gâchée par des principes scénaristiques en apparence immuables.