Sommes-nous dans une satire? À l’écoute de Simple comme Sylvain, réalisé par Monia Chokri, il s’agit de l’explication la plus logique: une satire de près de deux heures qui ne fracasse jamais le quatrième mur, et dont le scénario joue constamment sur le deuxième degré. Car l’alternative serait franchement fâchante.
Fâchante, oui, car cette comédie romantique franco-québécoise mettant en vedette Magalie Lépine-Blondeau et Pierre-Yves Cardinal déborde tellement de clichés absurdes et éculés qu’il est fascinant de constater que l’oeuvre a été largement applaudie à Cannes, notamment.
Sophia (Lépine-Blondeau), 40 ans, s’ennuie dans son couple et voit sa carrière piétiner. Accompagnée d’un conjoint intellectuel, mais sans passion, y compris passion charnelle, entourée d’amis aux intérêts trop pointus pour leur propre bien, elle trouve refuge dans les bras de Sylvain (Cardinal), un travailleur de la construction originaire de la campagne, éternellement vêtu de sa chemise à carreaux.
À l’idée d’une femme montréalaise trop intello, on oppose donc un gars « des régions » un peu con comme un balai. Mais Sylvain baise; alors Sophia baise aussi, allègrement. Y compris dans le chalet acheté pour beaucoup trop de cher et clairement pas inspecté avant la transaction que Sylvain doit retaper, en début de film.
Et… c’est à peu près ça. Pendant près de deux heures, ce journaliste a failli manquer de doigts pour compter le nombre de moments où l’envie d’interrompre le visionnement a failli l’emporter sur sa curiosité – et son désir de pouvoir écrire une critique. Car si Simple comme Sylvain offre un point de vue excessivement réducteur d’une certaine intelligentsia montréalaise, l’inverse est tout aussi vrai: les « provinciaux » y sont dépeints comme des imbéciles, croyant de plus aux fantômes et aux ovnis.
Pire, le film ne nous explique jamais ce que Sophia trouve à Sylvain, outre le fait qu’il est « simple »: avec son ancienne flamme comme avec la nouvelle, elle n’est clairement jamais heureuse, mais cet état de fait n’est à peu près pas examiné. En fait, le personnage de Sophia est excessivement unidimensionnel, la quarantenaire étant réduite à une adolescente qui pleure sa vie lorsque sa nouvelle fréquentation, qui se révèle aussi être un jaloux maladif, un impulsif et un colérique (surprise!), quitte le domicile de notre héroïne en claquant la porte et ne donne plus signe de vie pendant plusieurs jours.
Dépitée, déprimée, Sophia reverra son ex… avec qui elle couchera, mais clairement sans y trouver aucun plaisir, forcément.
« On s’aime, nous deux », ne cesseront jamais de se dire nos deux protagonistes, comme s’ils avaient besoin de se convaincre. Et nous, pauvres cinéphiles, qui attendons avec impatience qu’on nous propose un tantinet de profondeur, un tout petit peu de développement des personnages, on regarde finalement le générique apparaître en se demandant s’il est possible de récupérer les 107 minutes de Simple comme Sylvain.