Véritable film carte postale faite maison, French Girl s’amuse à faire la part belle aux charmes (et aux clichés) de chez-nous, dans un (trop) long-métrage qui aimerait bien pouvoir en offrir pour tous. Suivant les codes de la comédie romantique à la lettre, voilà un film qui étire et pimente légèrement la sauce culinaire, au détriment de plusieurs de ses nombreux charmes évidents.
Vous n’avez pas la berlue! C’est bien Luc Picard sur fond de la vieille capitale que vous verrez aux côtés des Américains Vanessa Hudgens et Zach Braff (lui qui renoue d’ailleurs avec les Québécois, plus d’une décennie après le délicat The High Cost of Living, qui l’opposait à l’époque à Isabelle Blais).
Si le couple qu’il forme avec notre irrésistible Évelyne Brochu nationale peut détonner au premier coup d’œil, il s’inscrit dans l’ADN de la comédie romantique typique, où un personnage, voire acteur humoristique, est « bizarrement » agencé à une jolie fille que l’on pourrait qualifier de « trop bien pour lui ».
L’adage « les contraires s’attirent » est souvent bien apprécié dans le genre, et sert de prétexte idéal pour les situations saugrenues. Ajoutez à cela la rencontre des beaux-parents, le typique Guess Who’s Coming to Dinner ou Meet The Parents, et difficile de faire plus sécuritaire comme prémisse.
Là où le film essaie plus ou moins d’être de son époque – Mambo Italiano était d’ailleurs passé par là il y a de cela trop longtemps –, c’est dans sa volonté d’offrir un certain gender-swap à l’ensemble.
Bien sûr que le couple qui file le parfait bonheur ne sera pas seulement mis à l’épreuve par la promesse d’un nouvel emploi de choix impliquant un déménagement notable, permettant du même coup de se rapprocher de la famille délaissée d’un personnage, mais aussi par le retour d’une menaçante et séduisante ancienne flamme.
Sauf que là, tout ceci est en faveur de la femme, la plus aventureuse du couple si l’on veut le formuler comme ça, elle qui après tout a « abandonné » momentanément les siens pour sa carrière et son nouvel amour.
Ces petits choix scénaristiques sont-ils réussis? Ce sera au public d’en juger. Tout comme il jugera de la justesse des gags qui ne touchent certainement pas toujours leurs cibles, à force de cogner avec un trop grand manque de subtilité. Le running gag sous les airs de Robert Charlebois, on s’en serait passé, disons. Malgré tout, la trame sonore mélangeant adéquatement un nombre respectable de pièces francophones est plus que bien accueillie.
Il faut dire qu’on donne beaucoup dans les stéréotypes, même si la distribution enjouée mord à pleines dents dedans. Certes, on aurait voulu plus de chair pour les nombreux Antoine Olivier Pilon, Muriel Dutil et compagnie, comme on connaît leur talent, mais on se délecte sans surprise des savoureuses répliques toujours lancées avec une répartie envieuse par l’unique Isabelle Vincent. Rémi Goulet, de son côté, a visiblement également beaucoup de plaisir.
Par contre, bien que le film soit le fruit des Canadiens James A. Woods et Nicolas Wright (plutôt acteurs de métier, mais aussi derrière le scénario de Independence Day : Resurgence), on semble avoir fait la part belle aux Québécois, qui malgré le ridicule des situations, ne sont jamais autre chose qu’attachants.
Une fleur admirable de la part de deux Canadiens anglais qui ont livré un film qui pourrait difficilement sembler plus québécois (même derrière la caméra, avec des noms comme Jean-François Lord, directeur photo caméléon, et l’omniprésent monteur Yvann Thibaudeau), n’en déplaise à la présence au générique d’un certain William Fichtner, dans un rôle plus discutable d’un auteur alcoolique.
C’est peut-être d’ailleurs un des problèmes de la proposition qui n’aide pas à écourter la durée un peu excessive de près de deux heures et une majorité de scènes qu’on aurait pu retirer sans problèmes : l’abondance de personnages colorés.
Pour le reste, il ne faut pas trop se faire berner par la tentative de parler brièvement de la situation alarmante des fermes au Québec, puisqu’on est certainement dans la légèreté ici, n’en déplaise aux détours dramatiques un peu plus grossiers qui ne servent majoritairement qu’à allonger, eux aussi, inutilement le récit. Le petit détour vers la haute gastronomie et le domaine culinaire en général n’est pas nécessairement plus développé que les personnages de soutien.
Reste alors une comédie romantique sympathique avec un je-ne-sais-quoi bien de chez-nous qu’on regarde pour les mêmes raisons habituelles que celles reliées au genre. Un classique? Probablement pas. Sauf que nous sommes loin de l’échec anticipée par l’affiche, ce qui est déjà ça de gagné.
5/10