La pièce Les mutant.es, présentée au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, en collaboration avec la Banquette arrière, est inspirée de la pièce Les mutants datant de 2012. Une décennie plus tard, les auteurs Sylvain Bélanger et Sophie Cadieux nous offrent non pas une suite ni une adaptation, mais plutôt un nouvel opus en reprenant leur démarche créative collective.
Les mutant.es ont maintenant la quarantaine. On les suit dans un retour à l’école, sans professeur. Ils portent des uniformes, tels des adolescents de l’école secondaire et évoluent dans un décor minimaliste, meublé par des tables et des bancs de cafétérias de polyvalente.
Les différentes épreuves auxquelles ils sont soumis sont menées par une intelligence artificielle, une voix hors champ omniprésente. Un tableau numérique surplombant la scène affiche les différentes catégories de test. « Je m’oriente », « Je m’adapte », etc.; les étudiants doivent répondre à tour de rôle.
Des concours d’art oratoire, jeux de pouvoir et j’en passe, sont aussi imposées aux étudiants tout au long de leur parcours, jusqu’à leur graduation.
« Qu’est-ce qui est intact en toi? » « Qu’as-tu pris au monde? » « Qu’as-tu laissé au monde? »… et de nombreuses autres questions ponctuent a quête de sens de ces étudiants; chacun y allant de sa réponse, espérant avoir la bonne. Mais est-ce qu’il y a réellement de bonne ou de mauvaise réponse?
Étant de la même génération que les comédiens, génération X coincée entre les baby-boomers et les milléniaux, je me suis sentie particulièrement interpellée par le questionnement existentiel des personnages. On rit, et souvent on rit jaune.
Une pièce d’aujourd’hui aux couleurs d’autrefois
La mise en scène de Sylvain Bélanger assisté par Jean Gaudreau est dynamique et efficace; les chorégraphies et les déplacements des éléments de décors s’enfilent au rythme des périodes de cours.
La présence de technologie moderne jumelée aux extraits vidéo des années 1980 projetés sur un écran blanc, comme on en retrouvait dans les écoles à l’époque, reflète bien la réalité de cette génération; ces gens ont grandi avant internet, puis à l’âge adulte, ont intégrés l’utilisation d’outils technologiques dans leur quotidien.
La distribution constituée d’une dizaine de comédien est excellente, chacun ayant de bref moment pour briller, mais sans mettre l’accent sur un personnage en particulier. Aucun mutant.es principal.e, toustes faisant partie de la même classe. Soulignons toutefois l’envolée de Simon Rousseau qui propose de faire du Québec le 51e état des États-Unis et l’hilarante démonstration d’auto-défense de Mathieu Gosselin.
Plusieurs enjeux sociaux sont abordés, dont la crise du logement, la présence sur les réseaux sociaux versus ce qu’on fait dans la vraie vie, l’éducation et on érafle quelques politiciens au passage.
Toutefois, le rythme est rapide et les enjeux trop nombreux pour qu’on y aille en profondeur pour certains: on est parfois étourdi par l’accumulation de références. Cela représente bien le rythme de vie effréné de cette génération, prise entre les parents vieillissants, les enfants, la vie professionnelle, la vie personnelle. Les mutant.es sont essoufflés dans leur quête de sens.