Est-il vraiment possible de se reconstruire, après un échec amoureux? Ou, mieux encore, est-il possible de tourner la page, sans que notre vie d’après ne soit indûment influencée par la vie d’avant? L’autrice Mélanie Noël explore le foisonnant monde du flou sentimental dans Debout dans vos absences.
Publié aux éditions du Hamac, ce roman aux allures de manifeste en filigrane, met en vedette cette femme, maintenant mère de famille, dont la vie a été traversée par la rencontre de trois hommes: un premier, anglophone, qui lui fera connaître une passion éphémère; un second, Maxime, largement mieux sous tous les aspects, avec qui elle aura ses enfants… Et il y a l’autre, rencontré un peu de façon fortuite, quelque part au milieu de tout ça. Et avec qui elle entretiendra, a posteriori, une conversation tout aussi électronique qu’épistolaire.
À travers les souvenirs des uns et les messages de l’autre, notre femme se cherche. Tente de définir son identité. Identité qui, bien entendu, n’est pas uniquement tributaire de ses amours, mais ceux-ci pèsent évidemment très lourd dans la balance. Surtout si, dans le cas présent, l’une des relations évoquées dans l’ouvrage a mené à la création d’une famille et à une longue vie commune.
Quoi qu’il en soit, Mme Noël cherche à départager le bon grain de l’ivraie, mais en amour comme en bien d’autres choses, les nuances sont parfois plus importantes que les options clairement définies. Si notre protagoniste n’est pas nécessairement malheureuse, elle se demande si elle en est à un point où elle doit accepter qu’elle n’aimera plus comme elle a déjà aimé, si la vie de mère, avec quatre enfants, l’a fait entrer dans une nouvelle ère, celle de l’amour amical, en quelque sorte.
Point de folles virées dans les bars, ici, ou d’aventures amoureuses d’un soir pour tenter de retrouver une jeunesse disparue; on demeure ici dans l’intellectuel, dans le cérébral, dans la réflexion quasiment pure et dure. Il en résulte un roman particulièrement intériorisé, du genre de ceux qui font réfléchir, qui déclenchent ce léger mouvement des engrenages qui, peu à peu, deviendra impossible à stopper.
À force de tourner les pages, et surtout en lisant les nombreuses missives écrites à un personnage externe, ou encore à l’intention de la narratrice elle-même, on peut d’ailleurs se demander si les choses ne pourraient pas aller un peu plus vite. Non pas que la chose ne soit pas intéressante, mais si les romans doivent généralement réussir à nous sortir de cette torpeur forgée par l’engourdissement face aux catastrophes et à la combinaison métro-boulot-dodo, on constate, ici, que la chose fait un peu défaut. Aurait-il été possible d’obtenir au moins l’équivalent littéraire d’un cri dans la nuit?
Roman peut-être trop prudent, trop intériorisé pour son propre bien, Debout dans vos absences demeure une oeuvre douce, délicate, qui s’égrène lentement comme les pétales d’une marguerite que l’on détache délicatement. Un baume léger pour les coeurs meurtris.
Debout dans vos absences, de Mélanie Noël, publié aux éditions du Hamac, 178 pages