Faire du neuf avec du vieux, voilà l’une des nombreuses propositions du remarquable Hell or High Water, de loin l’une des plus belles surprises cinématographiques de l’année, mais également un des films les plus réussis qu’on s’est fait offrir jusqu’à présent. Cela tombe bien puisqu’on peut enfin le voir ou le revoir dans son propre confort.
Si Sicario avait bien un point faible, c’était certainement dans les très nombreux fils blancs de son scénario. Pourtant, quelle est la surprise ici de retrouver nuance, profondeur et subtilité dans un récit étonnant qui entremêle les genres usés du western et du braquage de banque, alors que s’accumulent les thèmes familiers de la famille, de la liberté, de la vengeance et de l’Amérique, notamment. Comme quoi Taylor Sheridan était loin d’avoir dit son dernier mot dans une approche beaucoup plus mélancolique et bouleversante que les recoins mouvementés et sans répit de l’excellent film de Denis Villeneuve.
C’est d’autant plus surprenant de découvrir que le tout est orchestré par David Mackenzie dont la longue carrière n’a certainement pas eu que des coups aussi mémorables. Peut-être doit-on expliquer l’efficacité du long-métrage de par la symbiose parfaite qui se crée grâce à tous ses éléments gagnants. Que ce soit de sa distribution de premier ordre dominée par les performances électrisantes de Ben Foster, bien sûr, Jeff Bridges, sans l’ombre d’un doute, mais également de Chris Pine, ou encore de l’apport non négligeable de Nick Cave et Warren Ellis à la musique, ceux-là mêmes qui avaient auparavant magnifié le brillant western The Assassination of Jesse James by the Coward Robert Ford avec l’une des trames sonores les plus mémorables du 21e siècle.
C’est donc sans attentes qu’on se retrouve dans le feu de l’action, voyeur et impuissant face à la relation aux limites malsaines de deux frères plutôt différents l’un de l’autre, un méthodique et l’autre imprévisible, qui braquent des banques dans l’espoir d’un meilleur lendemain. Leur long chemin vers l’impossible, visiblement condamné comme dans tout western crépusculaire qui se respecte, trouvera son reflet miroir quand un ranger aux abords de la retraite se donnera comme mission de les arrêter coûte que coûte à l’aide d’un collègue de descendance mexicaine et amérindienne.
Plutôt lent dans son approche, le film multiplie les moments d’audace et les dialogues qui fondent dans la bouche, en plus d’un humour surprenamment décapant quand on s’y attend le moins. Mieux, le rythme est mené de main de maître alors que le suspense garde captif l’intérêt du spectateur qui rive ses yeux à l’écran sans pouvoir les détacher alors que tout s’enligne pour un dernier acte tout simplement merveilleux.
Si l’édition DVD est dénuée de tout supplément, on peut retrouver sur l’édition Blu-ray de nombreux segments making of, un Q&A et un extrait de tapis rouge. Les deux éditions proposent une piste audio doublée en français.
Pour ceux avides de cinéma intelligent, d’un film d’exception dans un paysage américain qui se noie sous les mégaproductions hollywoodiennes sans saveur, vous avez ici une proposition de premier ordre qui surprend de sa première à sa dernière seconde avec un long-métrage qui a tôt fait de rejeter du revers de la main toutes les sensations de déjà vu qu’on pourrait avancer. À ne pas manquer.
8/10
Distribué par VVS, Hell or High Water (ou Hors-La-Loi en version française) est disponible en Blu-ray et en DVD dès aujourd’hui.