Katherine Johnson, Mary Jackson, Donna Strickland, Vera Rubin, Jocelyn Bell, Lise Meitner et Amalie Emmy Noether. Elles sont mathématiciennes, physiciennes, astrophysiciennes. Vous ne les connaissez probablement pas. Elles auraient toutes pu remporter de prestigieux prix pour leurs découvertes. Et malgré leurs contributions au monde scientifique, leurs noms, leurs recherches et leurs parcours ont été maintenus dans l’ombre.
De concert avec l’artiste multidisciplinaire engagée MissMe, le Planétarium présente depuis quelques jours l’exposition NobELLES, une ingénieuse contraction des mots Nobel et elles. Pendant une année entière, du 27 avril 2023 au 28 avril 2024, les portraits de ces sept scientifiques orneront le hall du Planétarium. Le public peut voir gratuitement l’exposition durant les heures d’ouverture de l’institution.
Hommage visuel et féministe
Ces portraits à grande échelle affichés sur des bannières présentent d’un côté les œuvres de MissMe qui a ajouté son grain de sel à ses collages féministes en apposant des mots-chocs sur leurs visages, et de l’autre, l’histoire de ces femmes avec des textes percutants, qu’on lit tantôt avec émotion, tantôt avec la rage au cœur.
Bien plus qu’un simple hommage visuel, cette démarche artistique cherche à susciter la réflexion chez les visiteuses et visiteurs. L’exposition se veut féministe. Durant la soirée d’inauguration du 26 avril, l’artiste MissMe et le directeur du Planétarium, Olivier Hernandez, ont insisté sur cette tangente déterminante prise par le Planétarium au cours des dernières années : faire rayonner les sciences en s’impliquant socialement.
Décrite par MissMe comme le « fruit d’une rencontre improbable » durant le vernissage, cette exposition conjuguant art, science et enjeux de société est une collaboration pertinente entre l’artiste montréalaise de renommée internationale et le Planétarium. La science est l’affaire de tous et le féminisme est également l’affaire de tous.
L’artiste croit que la place de ces femmes a été occultée par manque de féminisme et d’intersectionnalité. C’est « la société dans son ensemble qui y perd », a-t-elle affirmé durant son discours inaugural. Par le biais de son art, elle a voulu leur redonner la parole.
Les scientifiques choisies sont issues de la diversité d’ethnicités, d’âges, de domaines, de pays et d’époques. Certaines n’ont pas reçu la reconnaissance qu’elles méritaient parce qu’elles étaient femmes, et d’autres encore parce qu’elles étaient femmes et non blanches. Les bannières qui illustrent ses collages et coups de crayon offrent une reconnaissance à ces femmes qui ont écrit un pan de l’histoire scientifique. Ces portraits audacieux célèbrent leur apport à la science en particulier et à la société en général, alors que souvent, c’était plutôt leurs pendants masculins qui raflaient tous les honneurs.
En parallèle, une baladodiffusion également intitulée NobELLES, produite par le Planétarium et réalisée par Lili Boisvert met aussi en lumière les contributions de femmes dont le travail a été d’importance exemplaire au-delà de la mince reconnaissance qu’elles ont obtenue.
L’apport des femmes en sciences : un combat toujours pertinent
Si encore aujourd’hui les femmes ne représentent qu’une mince proportion des scientifiques, il fut un temps où leur présence dans le monde des STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques) relevait pratiquement de l’hérésie. Elles étaient fréquemment oubliées, passées sous le radar en raison de leur genre, de leur statut ou de leur appartenance raciale. C’est ce que NobELLES cherche à mettre en lumière, à notre époque où les hommes dominent encore cette sphère.
Lors du vernissage de l’exposition, Olivier Hernandez a souligné qu’à l’échelle mondiale, on dénombre environ 30 % de femmes en STIM. Au Canada, ce taux passe à 20 % et au Québec, la proportion de femmes en STIM affiche un maigre 17 %. Dans cette optique, le Planétarium souhaite rendre les STIM plus accessibles aux filles et aux femmes, tout en sensibilisant le public à cette sous-représentation qui a longtemps fait ombrage à leur cheminement.
Katherine Johnson, Mary Jackson, Donna Strickland, Vera Rubin, Jocelyn Bell, Lise Meitner et Amalie Emmy Noether. Des noms que nous devons continuer de perpétuer, pour nous rappeler le chemin qui a été fait depuis, et celui qui nous reste encore à parcourir.
Une exposition audacieuse, coup de poing et nécessaire.
NobELLES au Planétarium Rio-Tinto-Alcan