Nommé roi de Bavière à 19 ans à peine, Louis de Wittelsbach entame son règne à un bien étrange moment : loin de pouvoir être un souverain à cette époque médiévale qu’il apprécie tant, il est plutôt un monarque alors que les révolutions font trembler l’Europe et que les perturbations géopolitiques laissent déjà présager l’horreur de 14-18. Rien pour aider le rêveur chef d’État, qui pense surtout à des Châteaux dans le ciel.
Basée sur des faits vécus, cette oeuvre de Marie-Claude Verdier jouée au Théâtre Denise-Pelletier propose donc un télescopage entre le rêve et la réalité; entre le désir d’aspirer à la beauté et à la transcendance et la nécessité de gouverner pour améliorer l’ordinaire de ses sujets.
Entre ces deux extrêmes, qui plus est forcé de tenter de donner un héritier au peuple alors qu’il est clairement homosexuel, le roi Louis II verra peu à peu son pouvoir lui échapper, ses plus proches conseillers s’avérant également être des traitres et des menteurs invétérés.
On voudrait croire, comme ce monarque, au pouvoir de la beauté, des arts, de l’immatériel. Mais pourtant, il faut bien reconnaître deux choses : tout d’abord, le pouvoir hérité du droit divin a toujours servi de justification pour les pires abus, qu’il s’agisse de commettre des massacres ou de dilapider l’argent public dans des projets absurdes; ensuite, tout dirigeant, s’il n’écoute ni son peuple, ni ses plus proches conseillers, finira par, au mieux, être envoyé à la retraite. Et au pire, finira par disparaître. Dont acte.
Qui n’a jamais rêvé, pourtant, de grands palais, d’opéras composés expressément par Richard Wagner, ou encore de chevauchées nocturnes avec l’être aimé, sous la lumière de la lune?
Brillamment jouée, avec une excellente utilisation des décors et du vaste espace scénique du théâtre, Châteaux du ciel est une oeuvre classique, certes, mais un genre de pièce qui a toujours sa place. Après tout, les personnages sont encore plus mémorables lorsqu’ils sont tragiques. Ajoutez à cela une dose d’amour chevaleresque, de drame et ce qui ressemble à un long plongeon dans la folie, et vous obtenez une pièce particulièrement solide qui, à l’instar de ce tableau montrant ce navire à voile remorqué par un bateau à vapeur vers ce qui devrait être son lieu de démantèlement, raconte superbement bien la fin d’une époque.
Châteaux du ciel, de Marie-Claude Verdier; mise en scène de Claude Poissant; avec Mikhaïl Ahooja, Félix Beaulieu-Duchesneau, Annick Bergeron, Frédéric Blanchette, Dany Boudreault, Myriam Gaboury, Maxime Genois, Fabrice Girard, Daniel Parent et Mary-Lee Picknell; au Théâtre Denise-Pelletier jusqu’au 15 avril
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