Proje(c)t; Les bonnes de Roxane Loumède, est une libre adaptation de la désormais classique pièce de Jean Genet. Si dans l’œuvre originale, c’est le texte qui domine l’attention des spectateurs, ici – alors que l’intrigue est similaire – le spectateur n’entend pas plus le texte qu’il n’est stimulé par la mise en scène, le jeu des actrices, les costumes, la musique, la vidéo et j’en passe…
L’intrigue demeure identique. Deux sœurs – Solange et Claire, des « bonnes » au service d’une riche patronne, Madame, naviguent entre haine et amour pour elle, dégoût et admiration, rejet et désir de lui ressembler. Et Madame le leur rend bien… Entre les deux sœurs, Solange et Claire, les sentiments sont aussi pleins d’ambiguïté. Et plutôt qu’à de l’affection entre ce trio infernal, c’est à des jeux de pouvoir qu’il se livre et qui se termineront inévitablement mal.
L’action se situe dans un riche quartier de Montréal. La patronne, ostensiblement snob et surfaite, parle anglais à ses deux employées, et celles-ci dialoguent entre elles en français, sauf lorsque l’une des sœurs devient symboliquement la bonne de l’autre et c’est alors l’espagnol qui s’invite dans cette hiérarchie des langues.
Tout est excessif dans la pièce de Roxane Loumède, et c’est ce qui en fait la qualité. Madame à laquelle les deux sœurs insatisfaites de leur sort veulent nuire – d’abord en dénonçant faussement son amant puis en désirant la faire disparaitre par strangulation ou administration de poison – fait aussi l’objet de leur admiration jalouse alors que tout est faux chez elle et qu’elle concourt toute seule à sa perte sans avoir besoin que les deux l’aident.
La jalousie du pouvoir est bien au centre de l’histoire, un pouvoir qui n’offre pas beaucoup d’avantages et ne sert qu’à masquer les réels problèmes de survie auxquels chacune des trois protagonistes fait face, un peu comme tout le monde…
Cette adaptation est intéressante en ce qu’elle offre tout un panel de représentations, y compris la vidéo en direct. Les trois actrices sont parfaites chacune dans leurs rôles respectifs et on les voit se métamorphoser physiquement en fonction des rôles qu’elles tiennent justement au sein de l’intrigue. Cela produit une intéressante mise en abyme avec des moments assez jubilatoires, mais qui se termine fatalement en autodestruction.
Proje(c)t; Les bonnes
Auteure de l’adaptation-metteure en scène : Roxane Loumède
Conseillère dramaturgique-français : Geneviève Gagné | Conseiller dramaturgique-anglais : Anthony Kennedy | Conseillère dramaturgique et traduction espagnol : Camila Forteza
Interprètes : Marie-Ève Bérubé, Camila Forteza et Alexandra Petrachuk
Du 6 au 10 septembre au théâtre La Chapelle