La pandémie de COVID-19 a affecté les ménages d’ici et d’ailleurs de mille et une façon, mais selon des chercheurs, l’une des transformations les plus tangibles, à la suite de l’éclatement de la crise, concerne l’industrie alimentaire. Il reste à voir, disent-ils, si cette nouvelle tendance s’inscrira dans la durée.
Comme l’expliquent des spécialistes de l’Université Penn State, une combinaison de problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement, à des budgets plus serrés, à des inquiétudes liées au magasinage dans des endroits publics, et à une augmentation des repas préparés à la maison a alimenté l’intérêt à propos des aliments locaux. Ces experts ont mené une expérience pour évaluer la pérennité de ce recours à la nourriture de producteurs situés à des distances relativement courtes.
Leurs conclusions, publiées dans le magazine spécialisé Agribusiness, indiquent que l’engouement pour les aliments locaux pourrait s’étioler rapidement, particulièrement si les consommateurs éprouvent de l’anxiété.
« Pendant la pandémie, la consommation de nourriture a changé, tout comme les sources de ces aliments », mentionne Martina Vecchi, principale autrice de l’étude. « Bien des gens ont commencé à explorer diverses façons d’acheter de l’argent, et nous voulions comprendre les facteurs qui déterminaient leurs décisions. »
En utilisant un sondage en ligne, les chercheurs ont demandé à 1650 participants de réfléchir à la pandémie et à leur volonté d’acheter des aliments locaux. Les résultats portent à croire que le fait de penser à la COVID-19 augmentait l’anxiété, réduisait le sentiment d’appartenance à la communauté, et réduisait le surcoût que les participants étaient prêts à payer pour des fruits, des légumes et de la viande locaux.
« Les principaux mécanismes qui alimentent la volonté décroissante de payer pour les produits locaux, c’est l’anxiété », précise Mme Vecchi. « Nous ne nous y attendions pas, mais gérer l’anxiété pourrait être l’une des choses les plus importantes à faire pour protéger la santé publique, s’il y avait une autre crise sanitaire. »
Les chercheurs ont entamé le coup de sonde en menant certains participants à réfléchir à l’impact de la pandémie sur leur vie personnelle, leurs finances et leur santé, ou encore celles de leur communauté locale et de ses membres.
Ils ont ainsi constaté que les deux demandes faisaient croître l’anxiété des répondants, réduisaient légèrement leur sentiment d’appartenance à la communauté, et diminuaient de beaucoup le surcoût hypothétique qu’ils étaient prêts à débourser pour de la nourriture locale.
Des hypothèses erronées
« Nous pensions qu’en raison de la pandémie, les gens achèteraient plus d’aliments locaux parce qu’ils penseraient que ceux-ci sont plus sécuritaires. Nous pensions aussi que la crise pourrait renforcer leur sentiment d’appartenance au groupe, et reflèterait donc une plus grande volonté d’acheter local », mentionne encore Mme Vecchi.
Les résultats font pourtant état de tendances à l’inverse de ce qui était attendu. Pour Mme Vecchi, l’augmentation des achats d’aliments locaux pendant la pandémie pourrait simplement être un résultat de problèmes en matière de chaîne d’approvisionnement, le tout combiné à des craintes à propos des épiceries, et non pas un reflet de changements permanents dans le comportement des consommateurs.
« Il ne semble pas que les consommateurs voulaient vraiment acheter davantage local », poursuit Mme Vecchi. « Oui, ils payaient pour de la nourriture locale, simplement parce qu’ils sentaient que c’était l’option la plus sécuritaire, mais pas parce qu’ils étaient vraiment prêts à payer plus cher. »
Au dire des chercheurs, il ne faut pas que les producteurs locaux s’attendent à ce que l’intérêt marqué pour leurs produits se poursuive.
« Ma recommandation pour les décideurs et les agriculteurs, c’est de tenter de soigner l’anxiété d’abord, ainsi que de renforcer le sentiment d’appartenance des consommateurs à leur communauté », a déclaré Mme Vecchi. « Nous devons trouver une solution pour cela si nous voulons continuer d’alimenter une économie locale en santé. »