Pourquoi changer une formule qui fonctionne? Les frères Duffer ont bien compris ce principe, encore plus avec cette quatrième saison de la célèbre télésérie Stranger Things, qui se déploie en 12 heures et des poussières sur Netflix.
Saison quatre, donc. Après la base soviétique secrète sous le centre commercial de Hawkins, voilà que c’est Vecna, un autre monstre venu de l’Upside Down, cette dimension alternative maléfique, qui sème la pagaille dans un monde qui vient à peine de se remettre des tragédies précédentes.
Cela ne fait en effet que huit mois que les événements de la saison 3 ont pris fin. Eleven, privée de ses pouvoirs, est envoyée dans une ville de Californie pour échapper aux autorités gouvernementales qui pourraient être tentées de l’utiliser à nouveau comme arme psychique. On peut cependant bien se douter que son intégration dans une société « normale » ne se fera pas sans heurts, avec moult références à tous ces films pour enfants et ados où des élèves font la vie dure à un jeune dont la seule faute est d’être différent.
De leur côté, Dustin, Max, Lucas, Erica, Steve, Nancy, Robin et Eddie, un rockeur nouveau venu président du club de Donjons et Dragons, se retrouvent aux prises avec une série de meurtres quasiment impossible à élucider : des jeunes, en apparence au hasard, semblent possédées par une force maléfique, puis tordues dans tous les sens, avant d’être… vidées de leur âme? La chose est peu ou pas expliquée, mais c’est l’infâme Vecna qui, à l’aide de ses pouvoirs, s’attaque à des gens rongés par la culpabilité liée à un événement traumatisant vécu récemment. Et si Vecna parvient à tuer quatre personnes de cette façon, il pourra alors directement ouvrir un portail entre l’Upside Down et Hawkins, précipitant la fin du monde.
Enfin, c’est ce qu’on nous laisse entendre. Max, qui a perdu son frère lors de la précédente saison, et qui a rompu avec Lucas, sera d’ailleurs prise pour cible par le grand méchant en personne.
De l’autre côté de la planète, Joyce et Murray feront des pieds et des mains pour tenter de retrouver Hopper, ancien shérif de Hawkins présumé mort lors de l’épisode final de la troisième saison, mais qui a plutôt été capturé par les Soviétiques et envoyé dans une prison de Sibérie. Une prison où des chercheurs entraînent et étudient certains monstres provenant d’une dimension maléfique bien connue…
Tout est donc lié à cette même thématique centrale qui sous-tend la série depuis ses débuts : celle d’un monde maléfique où errent des monstres qu’il faut combattre à l’aide des pouvoirs psychiques d’Eleven, certes, mais aussi grâce à l’ingéniosité et la détermination d’un groupe dépareillé de jeunes qui sont, avec le temps, devenu qui des amis, qui des amoureux.
À cela, au fil des ans, se sont greffés les sujets de l’adolescence, de la maturité, des relations amoureuses et interpersonnelles, de la parentalité, du deuil, de la confiance envers l’autorité… Et cette fois, on ajoute l’indépendance et la force des femmes dans le lot. Après tout, la série avait déjà fait la part belle à la gent féminine, notamment en montrant l’évolution de la relation entre Max et Eleven, ou encore la force de caractère de Robin, qui parvenait à accepter et vivre son homosexualité malgré les tabous qui y étaient associés à l’époque et l’ostracisation intrinsèque à l’adolescence.
Cette fois, on pousse la réflexion un peu plus loin, en évoquant non seulement l’autonomie des personnages féminins, mais carrément leur indépendance. En gros, pas besoin de nouer des relations amoureuses avec d’autres personnages – surtout des personnages masculins – pour faire progresser l’histoire.
Et c’est tant mieux! À défaut d’avoir un scénario « de fond » réellement original – c’est finalement au cours de la future cinquième saison que la grande saga connaîtra son dénouement –, cette quatrième saison de Stranger Things s’écoute comme on écoute une oeuvre jamais extrêmement originale, mais toujours très bien ficelée, et qui regorge de références.
À noter, entre autres : ce clin d’oeil à l’horrible Alien : Ressurection en compagnie de Winona Ryder, bien sûr; l’utilisation de pièces musicales iconiques, comme Running Up That Hill, de Kate Bush, et nul autre que Master of Puppets, de Metallica… On n’a jamais le temps de s’ennuyer, même si les neuf épisodes cumulent près de 12 heures au compteur.
Est-ce une saison fantastique, ou encore inoubliable? Pas vraiment. Mais c’est de la très bonne télé, les acteurs jouent bien, les références sont nombreuses, les effets spéciaux sont franchement réussis, la musique est excellente, et malgré les longueurs, il ne fait aucun doute que l’on souhaite ardemment savoir comment tout cela va se terminer. Qu’attendons-nous, alors?