Le nombre de véhicules électriques continue de croître sur les routes; aux États-Unis, une étude de Fortune Business Insights envisage une croissance du marché allant de 28,24 milliards $ US, en 2021, à 137,43 milliards en 2028. Pourtant, la question de l’autonomie continue de faire hésiter bon nombre de conducteurs et d’acheteurs potentiels, tout comme la perspective de devoir attendre une heure, voire davantage, pour faire le « plein ». Une étude de l’Université du Kansas propose maintenant une méthode aussi originale que surprenante : la recharge en groupe, sur la route.
Ces travaux, publiés dans Scientific Reports, s’articulent autour d’un système de « poste à poste » pour que des véhicules électriques puissent se recharger mutuellement en circulant sur les routes, le tout sous la supervision d’un système informatique fonctionnant à partir d’un service infonuagique.
« Lorsque plusieurs véhicules électriques circulent, ils peuvent partager leur charge entre eux tout en fonctionnant – il n’est pas nécessaire de stopper pour ce faire », mentionne Tamzidul Hoque, professeur adjoint en génie électrique et science informatique.
« Une voiture pourrait posséder une charge importante, et pourrait ne pas avoir besoin de se rendre très loin, et pourrait ainsi vendre sa charge à une autre voiture – il y a donc un incitatif économique. L’autre véhicule, qui doit effectuer un long déplacement, n’a pas beaucoup de charge, et le fait de ne pas devoir s’arrêter pour recharger pourrait retrancher plusieurs heures à la durée du voyage. »
Un système informatique mobile, fonctionnant à partir de serveurs situés à distance, « connecterait » les deux véhicules se trouvant dans le même quartier; ces véhicules pourraient ensuite voyager à courte distance l’un de l’autre, en échangeant de l’énergie sans avoir besoin de stopper à une station de recharge. Les véhicules circuleraient à une même vitesse, tandis que des câbles de recharge les relieraient automatiquement.
« Nous aurions un système complet fonctionnant par infonuagique qui analyse l’état de la batterie de tous les véhicules participants présents dans le réseau, et en fonction de ces informations, le système vous dirait que vous pouvez vous connecter à un véhicule situé tout près, et partager la charge électrique », mentionne M. Hoque.
« Tout cela doit être contrôlé par un réseau en ligne, qui possède des algorithmes qui rechargent de façon efficace tous les véhicules électriques. »
Toujours selon les chercheurs, les véhicules seraient équipés de deux batteries différentes pour ce système de recharge : une batterie principale à lithium-ion, comme celles qui se trouvent déjà dans les voitures électriques, et une autre batterie, à chargement rapide, pour utilisation sur la route. Cette deuxième batterie, lorsque chargée, « transviderait » son énergie dans la batterie à lithium-ion.
« Vous ne voulez pas que les véhicules demeurent connectés pendant très longtemps, parce qu’une autre voiture pourrait devoir changer d’itinéraire et se rendre ailleurs, et vous pourriez ne pas avoir assez de temps pour recharger », indique M. Hoque. « Voilà pourquoi nous avons développé le concept de batteries sur plusieurs niveaux pour réduire le temps de charge. »
Dans les zones très urbanisées, l’équipe de recherche propose de déployer des stations de recharge mobiles – de gigantesques batteries transportées par camion – qui peuvent recharger plusieurs véhicules à la fois, dans ce qui ressemble un peu à la façon dont les chasseurs peuvent être ravitaillés en vol par des avions-citernes.
« Ces stations de recharge mobiles circuleraient probablement sur les grandes autoroutes, où elles se déplaceraient constamment d’un point à un autre », ajoute M. Hoque. « Il y en aurait un certain nombre, alors à chaque instant, une station pourrait être sur la route, pendant qu’une autre est rechargée, à une station. »
Aux yeux des chercheurs, ce système entre pairs serait plus pratique, en plus de combattre cette « anxiété de l’autonomie » pour les propriétaires de véhicules électriques, tout en offrant une alternative plus verte.
Au dire de M. Hoque, il est vrai que la mise en place de l’infrastructure de recharge nécessiterait sans doute l’appui d’un important fabricant de véhicules électriques, mais que le système pourrait ensuite prendre de l’expansion de façon « organique ».
« Les propriétaires de véhicules auront cet incitatif pour vendre leur charge électrique et faire un peu d’argent – ces deux aspects fonctionneront de concert pour développer cette idée », a-t-il mentionné.