L’industrie de la mode est moins souvent sur la sellette que l’industrie pétrolière, mais les écologistes savent depuis longtemps qu’elle est extrêmement polluante. Et la tendance à la « mode rapide » ou « mode jetable » n’arrange rien. Y a-t-il des solutions en vue?
« Le secteur de la mode compte parmi les industries ayant un des impacts les plus importants sur les changements climatiques », en plus de renforcer « les inégalités socio-économiques à travers le monde. » rappelait en 2020 un document d’Oxfam.
Or, une bonne partie du problème vient de l’industrie de la « mode jetable », appelée en anglais fast fashion. Depuis une trentaine d’années, avec sa profusion de produits à bas prix, faits pour être achetés en grand nombre et portés peu de temps, qui s’en vont prestement à la poubelle puisqu’ils sont faits de matériaux non recyclables. La revue Vogue, spécialisée dans la mode, évaluait récemment à 100 milliards le nombre d’items produits chaque année, dont 60 % sont jetés dans l’année suivant leur achat. Et ce n’est plus juste une « mode » occidentale: en Inde aussi, le nombre de fois qu’un vêtement est porté aurait chuté du tiers depuis 15 ans.
L’industrie de la mode rapide est un succès d’un point de vue strictement économique, mais un désastre environnemental. Les chiffres à ce sujet varient, mais on s’entend pour la placer dans la liste des industries les plus productrices de gaz à effet de serre, loin derrière l’alimentation, mais probablement devant l’automobile et l’électronique. C’est en plus des 100 millions de tonnes de ressources non renouvelables consommées chaque année, et des 20 % d’eaux usées créées par l’industrie.
« La stabilité à long terme de l’industrie de la mode repose sur l’abandon total de la mode rapide », déclare dans le magazine scientifique New Scientist Kirsi Niinimäki, de l’Université Aalto, en Finlande, auteure entre autres d’une recherche qui, en 2020, estimait que le consommateur américain moyen achetait 66 vêtements par année et en jetait à peu près autant.
Sauf que l’industrie tarde à opérer le virage de la durabilité, ou de l’économie circulaire. Il existe des technologies qui peuvent permettre de réduire les émissions de GES de la chaîne de production, et des choix à faire — ou à imposer par les gouvernements — pour augmenter la production de vêtements faits de fibres recyclables. Le consommateur va aussi devoir y mettre du sien, ajoute Kirsi Niinimäki dans le New Scientist, et il pourrait y être aidé par des étiquettes qui lui permettraient de repérer les produits plus « verts ». « Les consommateurs disent que la chaîne d’approvisionnement devrait être plus transparente, de manière à ce que nous sachions exactement de quoi sont faits ces vêtements et dans quelles conditions ils ont été faits. »
On n’en est pas là. Mais reste que la façon la plus efficace de passer d’une « mode jetable » à une mode plus « durable » serait, selon un récent rapport de la Fondation Ellen MacArthur… d’utiliser plus longtemps ses vêtements.