Des chercheurs de l’Université de Manchester et de l’Université de Navarre ont examiné la valeur d’éventuelles connexions politiques, en Chine, entre des dirigeants d’entreprises et l’élite gouvernant le pays, lorsqu’il est question d’obtenir un accès préférentiel aux ressources. Connaître les bonnes personnes nuit cependant à l’efficacité, jugent les auteurs d’une nouvelle étude.
Selon les auteurs des travaux, être connecté à l’élite donne accès à des avantages, et ce malgré le lancement d’une importante campagne anticorruption par le président chinois Xi Jinping, il y a déjà une décennie. L’étude publiée dans le Journal of Institutional Economics indique également que les entreprises privées ont droit à des subventions plus importantes si au moins un administrateur a des liens avec le politburo du Parti communiste chinois. De leur côté, les entreprises appartenant à l’État qui comptent au moins un dirigeant ayant les bonnes relations ont aussi droit à certains privilèges, comme le fait de payer des taux d’intérêt moindres.
Les conclusions sont par ailleurs différentes, en fonction de la nature (publique ou privée) de l’entreprise; les connexions politiques sont ainsi plus avantageuses au privé, à la suite de la campagne anticorruption. Selon l’étude, les compagnies privées se retrouvent dans un environnement plus agressif en fonction du contexte chinois, et adoptent fréquemment des pratiques corrompues comme mécanisme pour assurer leur survie.
À l’opposé, la corruption au sein des entreprises étatiques est différente, puisque ces compagnies profitent déjà d’un statut privilégié au sein de l’économie chinoise, et n’ont pas besoin de s’adonner à de la corruption pour survivre. Ainsi, la valeur de ces connexions n’a pas augmenté après le lancement de la campagne anticorruption; cependant, les liens politiques ont gardé de leur importance.
Selon l’étude, chez les entreprises d’État, le problème de la corruption et des connexions personnelles se trouve du côté de la politisation de ces compagnies. Si ces entreprises d’État sont liées au gouvernement chinois, elles peuvent être utilisées pour faire avancer des intérêts politiques. Les chercheurs laissent entendre que le fait de réduire les liens entre politiciens et compagnies, et mettre en place des règles du marché, permettrait d’accroître l’efficacité.
L’étude fait d’ailleurs la lumière sur un mécanisme d’allocation des ressources qui est devenu de plus en plus important en Chine depuis 2012; un mécanisme qui, de l’avis des chercheurs, nuit à la croissance économique chinoise à long terme.
Si la campagne anticorruption a pu avoir d’autres effets positifs, les chercheurs estiment que l’amélioration des institutions liées au marché, en Chine, et l’offre d’un environnement plus favorable aux entreprises privées, nécessite des réformes plus importantes.
« Nous démontrons que la valeur des connexions dans le secteur privé a pris de l’ampleur après le début de la campagne anticorruption, parce que cela est devenu une alternative moins risquée à la corruption pécuniaire. Nous démontrons également que les compagnies qui ont des contacts en haut lieu ne fonctionnent pas mieux que les autres, malgré le fait qu’elles profitent de certains avantages. L’économie chinoise, dans son ensemble, finit donc par souffrir de l’impact de ces mécanismes », soutient un autre chercheur, le Dr Nuno Palma.