Bien que l’hommage soit particulièrement bien senti et réalisé avec beaucoup d’élégance et de maîtrise (on n’attendait rien de moins d’un cinéaste comme Ti West), il est tout de même étonnant que pour son retour à l’horreur au grand écran, en plus de sa première collaboration avec les réputés et toujours très ambitieux A24, on ait opté avec X pour quelque chose au final d’aussi conventionnel.
Loin d’être le nom le plus connu, Ti West s’est néanmoins taillé une belle réputation dans le genre horrifique par le biais de propositions modestes, mais élégantes. Pourtant, sa dernière proposition cinématographique, In a Valley of Violence, date de 2016 et c’était un western. Il s’est depuis recyclé vers le petit écran pour réaliser aléatoirement des épisodes pour un grand nombre de productions disparates.
On accueille donc sa nouvelle offrande avec beaucoup d’enthousiasme. Surtout qu’il renoue avec l’horreur, amène un vent de fraîcheur par une proposition originale, tout en se permettant de revenir aux racines des films de type slasher en se payant un voyage dans le temps, plus précisément à la fin des années 70.
Les références ne sont pas toutes subtiles, comme lorsqu’on parle de drogue, mais s’il manque le rock’n’roll, à défaut d’une sélection efficace de tubes de l’époque, il y a définitivement assez de sexe puisqu’on y raconte l’histoire d’une petite troupe d’amateurs déterminés à tourner le prochain film érotique qui va cartonner. Sauf que de le faire dans une vieille ferme au bout du monde, louée pour l’occasion à un couple de personnes âgées ayant leur propre jardin secret les poussera dans des situations qu’ils ne voyaient certainement pas venir.
Visuellement, c’est profondément accompli. Le film est traité avec respect et élégance; on ne tombe jamais dans la parodie, ni même dans les élans volontaires boboches des films grindhouse. On soigne d’ailleurs allègrement les images tout comme le montage, qui a plusieurs trouvailles qui permettent à l’œuvre de se distinguer par un style bien précis. Bien qu’on traite de la sexploitation, ce n’est jamais vulgaire ou gratuit. Mieux, le film donne la part belle à ses personnages féminins qui, sans nécessairement être plus agréables, sont tous nourris d’ambitions et de désirs d’affranchissement qu’on ne trouve pas toujours dans ce genre de films.
Il faut dire que la distribution aide beaucoup. West sait toujours bien s’entourer et son nouveau long-métrage n’y fait pas exception. Il y a de l’intérêt du côté masculin avec le chanteur Kid Cudi qui impressionne néanmoins et les satisfaisants Martin Henderson et Owen Campbell, mais c’est davantage Mia Goth, Jenna Ortega (qui vient tout juste de se faire remarquer dans le dernier Scream) et la toujours éclatante Brittany Snow (qui a également droit à son moment chanté) qui font tourner les têtes (et pas juste pour leurs attributs physiques, soyons rassurés).
Il y a aussi que le film se permet de développer l’envers de la médaille et d’apporter une profondeur inattendue du côté des prédateurs. Certes, au final on finit par garder la tangente du plus grand nombre de morts pour maximiser les meurtres et le sang en ne donnant pas toujours de véritable logique aux revirements. Il y a quand même quelques révélations qui tombent à plat et une introduction et une conclusion qui manquent de mordant (tout ce qui se rapporte au shérif enrobe trop superficiellement l’ensemble).
On ne prétend pourtant pas donner dans le méta ni vraiment de réinventer la roue. On a espoir ici et là que le film se permette un petit brio du calibre de The Cabin in the Woods, mais il n’en est rien. Ainsi, si l’on cherche seulement un slasher efficace, bien fait et classique, qui accumule les morts sans trop s’empiéter dans des codes, mêmes les plus classiques, X fait certainement très bien le boulot. Sauf que, plutôt fade à ses heures, on lui reprochera peut-être d’être un peu trop bien fait et de ne jamais se donner la possibilité d’aller au-delà de ses propres qualités. Ce qui en soi est loin d’être le plus grand des reproches, entendons-nous. Reste à voir où le prequel qu’on semble annoncer voudra nous amener.
6/10
X prend l’affiche en salle ce vendredi 18 mars. Plusieurs représentations ont lieu ce jeudi soir.
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