Plus de trois quarts de siècle après les événements, est-ce que tout a été dit sur la période qui a précédé le déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale? Le réalisateur Christian Schwochow semble penser le contraire, en dirigeant d’une main particulièrement efficace le long-métrage politique Munich – The Edge of War.
Lancé sur Netflix, et mettant en vedette l’inimitable Jeremy Irons, ainsi que George MacKay (1917) et Jannis Niewöhner (Berlin Station), le film raconte une machination se déroulant en marge des négociations de la dernière chance entre la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Italie pour régler la crise des Sudètes, cette région de ce qui était alors la Tchécoslovaquie, et qui, âprement réclamée par l’Allemagne nazie en raison de la forte proportion de germanophones qui s’y trouvaient, sera finalement cédée à Hitler en échange d’une promesse de paix durable en 1938.
Bien sûr, il n’en fût rien, et Hitler finit par annexer l’ensemble des territoires tchèques, et envahit la Pologne le 1er septembre 1939, déclenchant du même coup le pire conflit de l’histoire de l’humanité.
On a raconté bien des choses sur ces négociations de 1938, sur la faiblesse supposée de Neville Chamberlain, alors premier ministre britannique, et sur son obsession pour la paix. Obsession qui le poussa à adopter la politique de l’apaisement. À-plat-ventrisme devant Hitler pour les uns, stratégie permettant aux Alliés de gagner du temps pour les autres, cette stratégie suscite encore bien des débats, à notre époque.
Dans son film, pour complexifier les choses, Schwochow (qui adapte ici une pièce de théâtre du même nom) raconte les histoires de Hugh et Paul, l’un britannique, l’autre allemand, qui étaient autrefois amis, et qui se sont perdus de vue en raison de différences d’opinions politiques – à propos d’Hitler, justement. Le premier travaille au Foreign Office et sera appelé à conseiller Chamberlain. Le second est un traducteur dont les services seront ultimement requis par l’équipe du Fürher en vue des négociations de Munich.
Le hic, c’est que Paul déteste les nazis, et tente de provoquer un coup d’État en s’appuyant sur une éventuelle mutinerie de l’armée allemande après une attaque lancée contre les Tchèques. Et pour s’assurer que les Anglais ne signent pas de traité, il parvient à mettre la main sur un document détaillant la politique expansionniste du Reich, document qu’il entend bien remettre à son ancien ami Hugh.
Filmé avec une caméra très nerveuse, possiblement pour évoquer le niveau de tension ambiante, ou encore le stress des différents personnages, le film se veut à la fois un film historique et une histoire d’espionnage, nos protagonistes étant pratiquement emportés par la lame de fond de l’histoire avec un grand H.
Nos héros réussiront-ils à éviter un conflit mondial? Le film n’est pas une uchronie, et les Alliés cèderont bel et bien les Sudètes aux Allemands. Mais avec ce nouvel éclairage sur les événements, Munich – The Edge of War permet de mieux comprendre les motivations des différents grands acteurs de l’histoire, et d’aller un peu plus loin que les généralités perpétuées à travers les décennies. Un film qui plaira aux amateurs d’histoire, mais aussi aux simples curieux.