Avant la deuxième saison de The Witcher, les gens de chez Netflix s’en sont donné à coeur joie avec Nightmare of the Wolf, un antépisode de la saga de Geralt of Rivia, le célèbre mercenaire tueur de monstres aux pouvoirs magiques. À coeur joie, en effet, puisque ce long-métrage d’animation comporte assez d’action, de sang, de violence et de moralité floue pour combler les amateurs et les néophytes.
Les Witchers, donc, ont besoin de monstres pour faire de l’argent – et ainsi préserver leur mode de vie. Mais en effectuant leur travail, ils tuent aussi leur gagne-pain. Dans ce contexte, Tetra Gilcrest, une sorcière aux mystérieux pouvoirs, considère les Witchers comme les responsables de la multiplication des bêtes féroces qui s’en prennent aux habitants sans défense du royaume, massacrant ici et là sans distinction.
Vesemir, le personnage principal du film, réfute ces accusations, mais s’engage à faire la lumière dans cette sombre histoire. Ce qu’il découvrira, à la suite de combats débordants d’acrobaties mortellement dangereuses, transformera sa vision de sa confrérie et mettra en branle des événements qui se répercuteront jusqu’au moment où se déroule la série télé – sans oublier ce qui est rapporté dans les jeux et les livres, bien sûr.
La réputation du réalisateur de Nightmare of the Wolf, Kwang Il Han, n’est plus à faire: s’il n’a que quelques oeuvres à son actif dans ce rôle précis, voilà des décennies qu’il s’occupe d’animation et de storyboarding dans diverses productions animées, notamment les séries télé Avatar et The Legend of Korra, en plus de Mortal Kombat Legends: Scorpion’s Revenge.
Cette connaissance du milieu lui donne ici toute la marge de manoeuvre requise pour donner vie à Vesemir et aux autres personnages du film. Scénarisé par Lauren Schmidt Hissrich et Beau DeMayo, le long-métrage comporte des dialogues incisifs, des revirements scénaristiques inattendus et quantité de moments où le cinéphile se rendra compte qu’il a le sourire aux lèvres depuis quelques minutes.
Cet agréable état de fait est non seulement attribuable à la qualité de l’animation – les productions occidentales ayant fort heureusement gagné en qualité depuis plusieurs années, rattrapant ainsi ce qui se fait parfois de mieux en Asie –, mais aussi à deux facteurs décisifs: d’abord, le monde de The Witcher, à l’instar de celui de Castlevania, qui a eu droit à une série de quatre saisons sur Netflix, est un monde profondément sombre et violent.
On y meurt ainsi pour un oui et pour un non, et les créatures du Mal n’hésitent pas à faucher tout ce qui bouge pour alimenter leur soif de sang. Cela peut possiblement paraître anodin, mais ce côté froidement réaliste de la chose est encore relativement nouveau, surtout lorsqu’il est question d’oeuvres destinées au grand public. On est bien sûr toujours loin de Berserk, par exemple, mais même cette oeuvre phare a eu droit à une série et trois films d’animation, ces derniers étant justement offerts sur Netflix.
Le deuxième facteur, qui est corollaire au premier, est que rien n’est tout noir, ou tout blanc, dans l’univers du Witcher. Et c’est cette ambivalence qui avantage grandement autant la série télé que le récent film d’animation. Les seuls « chevaliers en armure », ceux qui se prétendent justes et bons, sont souvent massacrés en quelques instants, et seules les personnes à la moralité parfois douteuse réussissent à s’en sortir.
Bien sûr, Vesemir (comme Geralt) est généralement davantage bon que méchant, mais il l’expliquera lui-même, dans le film: il a besoin de gagner sa vie. Personne ne peut être complètement vertueux le ventre vide.
Bref, Nightmare of the Wolf, s’il est peut-être un peu court, comblera certainement les amateurs du genre, en plus de plaire largement à ceux qui ont apprécié Castlevania. Quelque chose à se mettre assurément sous la dent, bref, en attendant la prochaine saison de la série télé…