Si vous en avez quelque peu marre des limitations de la routine et du quotidien et cherchez à vous évader dans un univers fictif capable de vous amuser, il y a fort à parier que vous misiez énormément sur Free Guy et sa prémisse somme toute amusante, à défaut d’être bien originale, la faute à ses nombreux prédécesseurs et l’omniprésence des jeux vidéo. Dommage que Free Guy offre au final beaucoup trop peu de plaisir tout en nous rappelant bien trop à quel point il est important de vivre sa vie.
Film léger et d’été s’il en est bien un, Free Guy nous introduit dans un jeu en monde ouvert au gameplay particulièrement élaboré. Un peu à la manière de Boss Level, Wreck-It Ralph ou même The LEGO Movie, on y suit un protagoniste qui vit son quotidien sans trop s’en faire, encaissant les coups et les répétitions avec le sourire. Tout change du jour au lendemain, quand il prend conscience des larges possibilités qui l’entourent et se fixe soudainement un véritable but, tout comme une curiosité qui lui donne envie de désirer plus que ce qu’il s’est vu offrir toute sa « vie ».
Bien qu’il devienne de plus en plus une caricature de lui-même dans le rôle de plus en plus répétitif du bon gars niais, mais amusant et attachant, Ryan Reynolds demeure quand même l’incarnation parfaite de l’homme beige capable de nous embarquer dans ses aventures. Comme la grande majorité de ses projets des dernières années, il s’est beaucoup investi dans ce long-métrage (il l’a d’ailleurs produit) et cela se fait sentir tellement son bonheur de faire parti de l’ensemble y est palpable.
Le hic, toutefois, n’est pas nécessairement du côté de ceux devant la caméra, comme ils font du mieux qu’ils peuvent avec ce qu’ils ont (on saluera d’ailleurs un retour à l’écran très bien accueilli d’une personnalité chérie qu’on n’avait pas vu depuis un moment et dont la participation au film a été judicieusement gardée secrète), sauf peut-être Taika Waititi qui a encore une fois bien moins de plaisir que dans ses propres projets, comme c’est le cas dans le récent The Suicide Squad, mais plutôt de ceux qui l’ont conçu.
Bien que sympathique, Shawn Levy a surtout été aux commandes de films faits pour plaire au plus grand nombre et principalement à la famille dans le sens large du terme, que ce soit les trois Night at the Museum ou Real Steel. S’il s’est essayé ici et là avec des œuvres dirigées vers un public plus mature avec Just Married, Date Night ou This is Where I Leave You, notamment, il a toujours gardé un intérêt particulier pour le mignon et les belles valeurs. Si Free Guy se situe un peu à mi-chemin entre ses types d’œuvres habituelles, il continue certainement la tradition des morales à deux balles en se contentant de ne pas trop bousculer son auditoire, à défaut d’essayer de le réveiller.
Se sortir de son quotidien est d’ailleurs une thématique qui lui est chère et on aurait aimé qu’il trouve finalement des scénaristes dignes de donner vie à la jolie idée derrière le projet. Malheureusement, Zak Penn, à qui l’ont doit plusieurs atrocités telles Elektra, X-Men : The Last Stand et The Incredible Hulk, ne fait guère mieux qu’avec Ready Player One avec un scénario constamment limité par ses propres balises qu’il a co-écrit avec Matt Lieberman. Sauf que ce dernier n’a pas fait grand-chose de mieux, si ce n’est le bizarrement absurde Playing With Fire qui de manière étonnante, se permettait davantage de folies.
Un peu comme s’il voulait continuellement justifier son concept et s’assurer que tout s’imbrique logiquement, Free Guy s’empêche ironiquement la liberté et la fluidité et incorpore à l’ensemble une grande part de l’histoire avec un grand « h » se déroulant dans le « monde réel », ne laissant que bien peu, sauf le convenu d’avance, dans le monde virtuel. Ainsi, en plus des romances développées avec la maladresse d’un adolescent, le film donne l’impression de ces fenêtres insistantes dans les jeux vidéo qui nous forcent à lire l’histoire en nous empêchant de pouvoir passer à travers.
En tant que spectateur, face à notre incapacité de contrôler le jeu, on aimerait au moins avoir droit ne serait-ce qu’un peu à la partie du plaisir, mais celle-ci, sauf peut-être quelques gags qui font mouche à de rares reprises, s’avère trop peu présente n’en déplaise à l’enthousiasme généralisé de l’ensemble. Même les cameo, les références et les liens à l’univers des jeux vidéo vont en deçà de ce qu’on aurait attendu, probablement dans la même optique de ne pas trop spécialiser son public et de pouvoir s’adresser au plus de gens possible.
Cela empire lorsque Levy retombe dans les pièges de son The Internship et s’enfonce au dernier tournant dans un étalage maladroit et nauséabond de placement de produits qui semble difficile de ne pas attribuer au changement d’appartenance du film en cours de route.
Free Guy fera certainement plaisir à ceux qui n’en demandent pas trop, mais atteint rapidement ses propres limites diminuant toujours peu à peu le plaisir qu’il aurait pu en découler. Surtout considérant de nombreux invraisemblances, improbabilités et détours scénaristiques qui démangent, en plus de ce scénario qui handicape continuellement le film.
Et s’il n’y a malheureusement rien durant ou après le générique histoire de nous en donner un peu plus face à sa fin certainement très simpliste, on vous met toutefois au défi de trouver au minimum trois cameo vocaux dont vous trouverez les réponses dans ledit générique.
5/10
Free Guy prend l’affiche en salles ce vendredi 13 août.