Toute bonne chose a une fin; en fait, mêmes les choses ordinaires, voire médiocres ont une fin, dieu merci. Sauf peut-être la télésérie Handmaid’s Tale, dont la quatrième saison vient de se terminer, et dont les producteurs semblent rêver d’une suite à une histoire qui, malheureusement, se répète maintenant depuis trois saisons, et qui pourrait fort bien se terminer ici, sans que personne n’en soit plus malheureux.
Voilà donc quatre saisons que June Osborn (Elisabeth Moss) tente de s’échapper de Gilead, en récupérant du même coup sa petite fille qui lui a été enlevée, lors de sa capture par les forces fondamentalistes, et confiée à une autre famille.
Par trois fois, on lui a offert l’option de se sauver, de retrouver son conjoint au Canada. Et par trois fois, elle a préféré rester dans ce qui était autrefois les États-Unis, soumettant du même coup les téléspectateurs à des séances parfois franchement éprouvantes de torture porn.
On comprend très bien, certes, la nécessité de montrer qu’un régime d’extrême droite et théocratique est fondamentalement un régime violent, d’autant plus que le régime en question érige le viol systématique des femmes en état de procréer au rang de cérémonie divine.
Cela étant dit, et il s’agit certainement de quelque chose qui a déjà été largement reproché à la série, la ligne est mince entre le fait de montrer une situation terrifiante et forcir le trait à un point tel que l’on dépasse le fait d’être scandalisé pour devenir blasé. Après quatre saisons, sommes-nous vraiment choqués de voir les gens de Gilead torturer et assassiner des opposants et des récalcitrants?
Quoiqu’il en soit, June finit par s’enfuir et se retrouve au Canada, en compagnie de son époux et des amies qu’elle avait déjà fait sortir. Tout est fini, l’histoire se termine bien, non? Pas tout à fait. Car elle est arrivée en sécurité sans récupérer sa fille, d’abord, mais a aussi été profondément marquée par son existence en tant que servante écarlate et en tant que membre de la résistance, et est particulièrement atteinte d’un syndrome de stress post-traumatique. Pour elle, utiliser la violence pour obtenir ce qu’elle veut n’est plus une seconde nature; il s’agit plutôt de son premier choix lorsque vient le temps de prendre des décisions.
Cette évolution du personnage de June est logique, soit, mais hautement prévisible, tout comme le sont les comportements de ses proches face à cette « nouvelle » réalité.
A-t-on atteint la limite de l’imagination des scénaristes? Peut-on vraiment encore présenter cette série, d’abord centrée sur les interactions entre une poignée de personnages, si le script semble mener vers un conflit à grande échelle entre Gilead et son voisin canadien? Ou, au contraire, serons-nous satisfaits si June « réussit seulement » à retrouver sa fille, alors que sa lutte est celle de toutes les femmes, de tous les gens libres contre la chape de plomb de l’obscurantisme religieux? La question est pour l’instant sans réponse, et on ignore bien franchement si une cinquième saison (dont au moins un épisode est inscrit sur IMDB) permettra de clore le dossier, ou si Hulu va plutôt chercher à maximiser ses profits jusqu’à ce que le livre de Margaret Atwood ne soit plus qu’un vague souvenir.