Martin Prévost
La saison 2016-2017 de l’Orchestre symphonique de Montréal était lancée la semaine dernière avec un programme qui ne pouvait que faire salle comble.
En effet, maestro Nagano a choisi de mettre au menu la version avec chœur et orchestre des Carmina Burana de Carl Orff avec, en ouverture de concert, le Concert Românesc de Gyorgy Ligeti. Les solistes étaient Aline Kutan, soprano; Frédéric Antoun, ténor et Russel Braun, baryton. Le chœur de l’OSM avait été préparé par Andrew Megill, son chef de chœur.
L’œuvre de Ligeti présentée samedi soir, à la Maison symphonique, se classe sans doute parmi les plus accessibles de son catalogue. Elle est brillante, joyeuse, surprenante. Elle utilise toutes les palettes d’un orchestre symphonique et a permis aux musiciens de démontrer qu’ils sont capables de faire dans la finesse, sur le fil du rasoir, avec un succès enviable. À un certain moment dans le sillage du premier violon, tout l’orchestre nous a donné l’impression d’assister à une immense fête de village, dans la plus pure tradition de la musique folklorique roumaine. De quoi se trémousser sur son fauteuil et se mettre à taper du pied.
Dans les secondes qui ont suivi la fin de cette première pièce, les musiciens étaient prêts, ô combien prêts, à entamer la pièce de résistance de la soirée. Une œuvre qui suffit à justifier une carrière de musicien : Carmina Burana.
Disons-le tout de suite, nous n’avons pu détecter qu’une seule petite faiblesse dans cette interprétation magistrale. Une attaque des cuivres nous a paru un peu hésitante. Dans laquelle des 25 parties ? Honnêtement, je n’ai que le goût de l’oublier tellement le reste était vivant, fluide, intense, subtil et grandiose. Grandiose, l’œuvre l’est déjà. Mais il faut pouvoir se montrer à sa hauteur et beaucoup de joueurs sont en jeu. Le chœur, d’abord. Magnifique. La richesse et la subtilité des basses. La pureté et la précision des sopranos. La vivacité et la complicité de tous. L’orchestre ensuite. Toujours aussi compétent et presque incomparable dans le répertoire du 20e siècle. Le chef, bien sûr, qui est parfaitement en contrôle et qui démontre un plaisir évident à diriger cette œuvre avec un orchestre et un chœur qui lui répondent au doigt et à l’œil. Les solistes, finalement, qui ont fait plus que tirer leur épingle du jeu. Aline Kutan est peut-être plus brillante encore que lors de sa participation à l’opéra Falstaff, à Montréal, il y a quelques années. Frédérique Antoun, toujours aussi coloré, intense et, cette fois, drôle par-dessus le marché. Et que dire de Russel Braun qui s’est tellement imprégné de son rôle qu’on se serait cru à l’opéra.
Comment s’est terminée cette soirée ? Par une ovation d’une durée rarement vue à Montréal où le public est pourtant très généreux. Je n’ai pas compté, mais l’ovation a probablement duré plus de 7 ou 8 minutes et le maestro, ainsi que les solistes et le chef de chœur ont dû revenir sur la scène pas moins d’une demi-douzaine de fois. Un public ravi direz-vous ? Bien sûr. Et la barre est maintenant placée bien haut pour la saison 2016-2017 de l’OSM.