Qui envoie son enfant dans des concours de beauté? Apparemment, la mère d’Elizabeth Vernn, qui a clairement voulu se projeter dans le corps de sa petite fille et vivre la gloire à travers elle. Mais cette entrée dans le monde des mini-miss s’est transformé en quelque chose de beaucoup plus profond – et toxique – dans le roman Florida, d’Olivier Boudreaut, publié chez Finitude.
De poupée à femme vengeresse, la transformation de la jeune fille, puis jeune femme, semble à la fois inéluctable et terrifiante. Car une fois entrée dans ce système qui broie les gens, Elizabeth n’en ressortira pas, ou du moins jamais complètement.
Cette obsession du corps, cette dualité entre la « perfection », telle que décidée par le « système », et celle d’un corps ordinaire, beau dans sa banalité et dans sa normalité, tout cela se télescope, se heurte, explose pour mieux se reconstruire tout au long du roman.
Elizabeth n’est ainsi certainement pas un personnage captif de son propre imaginaire, ou encore de sa propre histoire. Quant à savoir si elle est prisonnière de sa propre psyché, c’est là une question à laquelle les lecteurs ne sont malheureusement pas en moyen de réponse.
Ce qui peut être dit, cependant, c’est que l’héroïne, fort en gueule, est fondamentalement troublée. Ébranlée, même. Le seriez-vous, également, si votre mère volait votre enfance pour vous faire jouer à la poupée, en allant jusqu’à vous enduire d’autobronzant et vous faire porter des soutiens-gorge à l’âge de 7 ans? Comment peut-on honnêtement espérer s’en tirer à bon compte dans de telles conditions?
Voilà donc le destin de notre personnage principal: errer comme une âme en peine, le coeur et l’esprit marqués à vie par cette tentative d’appropriation parentale.
Heureusement, tout cela, à défaut de représenter un exemple à suivre de relation filiale, fait de la bien bonne littérature.
Florida, d’Olivier Bourdeaut. Publié aux éditions Finitude, 254 pages.