Ce dimanche, en l’Église Saint-Enfant-Jésus du Mile-End, l’ensemble Constantinople retrouvait enfin son public. L’occasion était double, car ce concert clôturait deux festivals à la fois: la 4e édition du Festival des musiciens du monde et la première édition du Festival La cité des Dames, créé par Suzie LeBlanc. Ce nouveau festival présente des concerts et des conversations mettant en valeur le rôle de l’impact des femmes sous un angle musical.
Pour enchanter, à la fois ce mariage et ce jeu de miroirs entre Venise et Constantinople, l’ensemble a eu l’excellente idée d’inviter trois sopranos ayant chacune leur style propre. Andréanne Brisson-Paquette avec sa voix suave et ronde; Suzie LeBlanc, qui pourrait se passer de présentation, mais dont on peut tout de même rappeler à quel point son registre est varié et combien sa voix demeure céleste; et Ariadne Lih, une découverte pour nous, avec son allure pétillante et sa voix puissante et cristalline.
Au menu, une majorité d’œuvres de l’imposante compositrice d’origine vénitienne, Barbara Strozzi et des œuvres, entre autres d’Ali Ufki et de Kapsberger. Pour expliciter les choix dans ce programme, des notes de programme extrêmement bien rédigées qui donnent envie d’en savoir plus les échanges culturels des 16e et 17e siècles.
Malgré l’inconfort des bancs d’église, nous aurions souhaité que cet après-midi de concert se prolonge encore et encore. Justification: Kiya Tabassian manie le sétar comme s’il s’agissait d’une extension de son corps, avec maîtrise et dynamisme. Tanya LaPerrière, au violon baroque et à la viola d’amore, qu’on a surtout connue chez Arion, s’adapte parfaitement à ce nouveau répertoire. Patrick Graham, manie les percussions avec plus de subtilité que ce qu’on a déjà entendu chez Constantinople : c’est intéressant. Didem Başar est une véritable virtuose du kanun. Michel Angers et Lucas Harris font résonner leurs théorbes comme ce qu’ils peuvent être, des instruments majeurs.
Dans presque chacune des œuvres, le jeu d’ensemble est équilibré, les voix et les instruments se répondent très bien, l’énergie est palpable et la passion est évidente. Il est juste un peu dommage que Brisson-Paquin n’ait pas un peu plus de puissance, car on ne perdrait rien alors du velours de sa voix.