Des chercheurs ont réanimé des spécimens d’un champignon qui provoque le flétrissement du caféier pour découvrir comment la maladie a évolué, et comment la contamination peut être évitée.
La maladie du flétrissement est provoquée par un champignon qui a entraîné des éclosions dévastatrices depuis les années 1920, en Afrique subsaharienne, et affecte actuellement deux des variétés les plus populaires de café africain, soit l’Arabica et le Robusta.
La nouvelle étude démontre que le champignon a probablement renforcé sa capacité à infecter les plants de café en acquérant des gènes à partir d’un champignon qui lui est lié, et qui provoque le flétrissement d’une vaste quantité de plants, y compris la maladie de Panama chez les bananes.
Selon les chercheurs, ces connaissances pourraient aider les agriculteurs à réduire le risque d’émergence de nouvelles souches de maladie, par exemple en ne plantant pas de café près d’autres espèces, ou en empêchant l’accumulation de débris de plantes au sein desquels pourrait vivre ce champignon lié.
L’équipe de recherche soutient également que l’étude d’échantillons recueillis par l’organisation agricole sans but lucratif CABI pourrait offrir des informations sur la façon dont les maladies des plantes évoluent et trouver de nouvelles méthodes durables pour les combattre.
Les travaux ont été publiés dans BMC Genomics.
La principale auteure de l’étude, Lily Peck, affirme que « l’utilisation de quantités croissantes de produits chimiques et de fongicides pour combattre les maladies émergentes n’est ni envisageable à long terme, ni abordable pour un grand nombre de cultivateurs ».
« Si nous pouvons plutôt comprendre comment évoluent ces nouveaux genres de maladies, nous pourrions donner aux agriculteurs les connaissances nécessaires pour réduire le risque d’apparition de ces maladies. »
L’équipe a réanimé des échantillons cryogénisés du champignon qui provoque la maladie du flétrissement du café. Deux graves éclosions de la maladie ont été recensées, entre les années 1920 et 1950, et durant les années 1990 et 2000, et elle provoque encore des dégâts. Par exemple, en 2011, 55 000 plants de Robusta ont été tués par le flétrissement en Tanzanie, détruisant 160 tonnes de café par la même occasion, soit ce qu’il faut pour produire plus de 22 millions de tasses de café.
Ravages
Lors de l’éclosion ayant débuté durant les années 1920, la maladie a infecté une grande variété de sortes de café, et a été éventuellement contrôlée dans les années 1950 à l’aide de méthodes de gestion comme la destruction par le feu des plants infectés, le fait de rechercher des résistances naturelles dans le café, et des programmes de reproduction ayant permis de sélectionner des variétés de plantes plus résistantes.
Cependant, la maladie a réapparu dans les années 1970, et s’est très largement répandue dans les années 1990 et 2000. Deux types séparés de cette maladie ont été identifiés, chacun s’attaquant à des catégories spécifiques de café: le premier a visé l’Arabica en Éthiopie, l’autre le Robusta en Afrique de l’est et centrale. L’équipe voulait déterminer comment les deux souches avaient émergé.
Après avoir « réveillé » diverses souches, puis séquencé le génome de celles-ci, les scientifiques ont examiné leur ADN pour des traces de changements qui pourraient les aider à infecter ces variétés de café.
Ils ont constaté que les champignons plus récents et spécifiquement adaptés à certains types de cafés possédaient des génomes de plus grande taille, et ils ont aussi identifié des gènes qui pourraient avoir aider les champignons à vaincre les défenses des plantes et survivre au sein des plants eux-mêmes pour provoquer la maladie.
Les scientifiques ont aussi découvert que ces gènes étaient très similaires à ceux que l’on trouve dans un champignon différent, mais très étroitement lié à ce « cousin », qui affecte plus de 120 plantes différentes, dont les bananes an Afrique subsaharienne, ce qui provoque la maladie de Panama, qui ravage actuellement la variété la plus populaire de ce fruit, les bananes Cavendish.
Si des souches de ce champignon qui s’attaque aux bananes sont connues comme étant capables d’échanger des gènes, leur conférant l’habileté d’infecter de nouvelles variétés de plantes, ce transfert potentiel de gènes vers une nouvelle espèce de champignon n’a pas encore été observé. Cependant, l’équipe de recherche a noté que les deux espèces vivent parfois très près l’une de l’autre, sur les racines de plants de café et de bananes, et qu’il serait donc possible que le champignon du café eut obtenu ces gènes avantageux à partir de son voisin s’attaquer au fruit à la peau jaune.
Le café et la banane sont souvent cultivés l’un à côté de l’autre, le caféier aimant bien l’ombre offerte par les plants de bananes, qui eux sont plus grands. Au dire des chercheurs, les récents travaux pourraient suggérer de ne pas cultiver de cette façon des plantes souffrant de maladies si similaires. Cela permettrait, disent-ils, de réduire les possibilités d’émergence de nouvelles souches de champignons tueurs.
La meilleure défense, c’est l’attaque
Les chercheurs utilisent maintenant les souches réanimées pour infecter des plants de café en laboratoire, afin d’étudier comment le champignon s’attaque à la plante, ce qui pourrait fournir de nouveaux moyens de défense contre la maladie.
Les conclusions des travaux pourraient aussi servir à protéger différentes sortes de plantes, surtout dans un contexte où des espèces différentes, situées très près dans les champs, pourraient permettre aux espèces nuisibles d’effectuer des « sauts » similaires et favoriser l’émergence de nouvelles maladies.
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