Que font une ancienne personnalité importante du monde des riches New-Yorkais, sa meilleure amie, son fils, l’ancienne fiancée de ce dernier, l’amoureux éconduit de celle-ci, une veuve décidément beaucoup trop entreprenante, un détective privé et une femme capable d’établir un lien avec la personnalité d’un homme mort désormais coincée dans un chat? Ils font tous partie de la distribution de French Exit, un film étrange et délirant réalisé par Azazel Jacobs.
À New York, donc, Frances Price, dont le conjoint est décédé dans d’étranges circonstances, n’a plus un rond. Ancienne vedette des divers cercles sociaux des nantis, elle a toujours eu un comportement particulier, et la voilà maintenant poussée à la ruine, sans véritables amis vers qui se tourner pour la suite des choses. En fait, c’est faux: sa meilleure amie lui viendra en aide et lui recommandera de se rendre en France, pour occuper son appartement parisien.
Ce personnage, interprété avec autant de grâce que de plaisir par Michelle Pfeiffer, est évidemment le pilier central du scénario de Patrick deWitt, qui adapte ici le contenu de son propre livre. Autour d’elle, les gens vont et viennent, comme des formes mutantes de la propre psyché de Frances. Sa relation avec son fils est ainsi quasi-inexistante, mais à travers lui, elle semble vivre une véritable vie, quelque chose de différent que le fait d’assister aux mêmes soirées avec les mêmes personnes, le tout dans l’objectif de vieillir lentement et finir par disparaître sans vraiment laisser de trace.
Cette façon de présenter la vie de cette famille sur le déclin, avec une bonne dose d’humour pince-sans-rire et d’échanges étranges et déstabilisants, pourrait faire penser à un film de Wes Anderson. Le fait d’entrer soudainement en communication mystique avec le mari mort réincarné en un chat évoque certainement les créations les plus folichonnes du célèbre cinéaste.
Pourtant, ici, Jacobs ne veut pas complètement donner dans l’absurde, mais cherche plutôt, avec ces échanges étonnants, à créer une sorte d’univers autonome, contenu en lui-même. Comme si le personnage de Frances vivait dans une bulle à l’extérieur de la société, et que la fin annoncée de ce train de vie luxueux et certainement superfétatoire représentait une sorte de retour à la normale, de premier pas dans le monde réel.
French Exit est-il un grand film? Pas vraiment: on apprécie justement la démarche artistique du réalisateur, et il est certainement rafraîchissant d’avoir droit à un long-métrage qui prend des chances, qui ose surprendre, au risque de décevoir. Le problème, peut-être, est le fait que l’oeuvre ne fait jamais suffisamment pencher la balance du côté du drame, ou, à l’autre extrémité, du côté de l’absurde. On en retire donc un plaisir limité, comme une impression de langueur, ou plutôt d’incertitude qui crée un léger malaise.
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