Le 5 janvier, un sondage Léger révélait que 48% des Canadiens, et 46% des Québécois, avaient déclaré avoir visité parents ou amis au moins une fois durant les Fêtes. Tous ces Québécois ont-ils vraiment contrevenu aux règles sanitaires? Le Détecteur de rumeurs apporte quelques bémols.
Tout est dans la question
Les sondages permettent d’obtenir une photographie des actions et des opinions d’une population. Encore faut-il que la question posée soit claire. Le sondage, mené les 2 et 3 janvier auprès de 1506 Canadiens, dont environ 400 Québécois, incluait ainsi cette question: « Au cours de la période récente des Fêtes, avez-vous rendu visite à des membres de votre famille ou à des amis qui vivent en-dehors de votre domicile ? »
Une majorité de Québécois (54%) ont déclaré qu’ils n’avaient pas effectué de telle visite. En reste donc 46% qui ont reconnu l’avoir fait, dont la majorité (33% du total) a dit ne l’avoir fait qu’une seule fois.
Or, le terme « rendre visite » est plutôt vague et sa compréhension a pu varier d’une personne à l’autre.
La question, confirme Christian Bourque, vice-président de Léger, a été incluse dans l’étude par l’Association des études canadiennes (AÉC), partenaire du sondage: « étant donné que la question a été posée partout au Canada, et que ce qui est ou non permis change par province, nous avons préféré garder la question plus large ».
Ainsi, cette question pouvait inclure des situations qui n’étaient pas interdites, et qui étaient même suggérées. Lorsque toutes les régions du Québec sont passées le 17 décembre en zone orange ou rouge, et que les rassemblements sont donc devenus interdits, on avait toujours le droit de pratiquer des activités sportives et récréatives extérieures par groupes de huit personnes. Par ailleurs, les personnes seules (et leurs enfants) étaient autorisées à se joindre à une bulle familiale durant les Fêtes. Autrement dit, une partie de ces 46 % pourraient avoir vu des amis ou de la famille en toute légalité.
Des réponses pour bien paraître?
Il est vrai que l’inverse est également possible: des Québécois qui auraient contrevenu aux règles pourraient avoir hésité à le dire au sondeur.
Pour l’AEC, qui a commandé ce sondage, les résultats « suggèrent fortement que de nombreux Canadiens ont donné la réponse socialement souhaitée aux enquêteurs ». Il faut toutefois noter que les sondages web seraient moins sujets à ce biais d’acceptabilité sociale, en raison de leur anonymat, selon une revue de la littérature publiée par l’INRS en 2015.
Reste que l’augmentation constante du nombre de cas de COVID-19 laisse croire que des rassemblements ont bel et bien eu lieu durant les Fêtes, estiment des experts en santé publique — ce que confirment d’ailleurs les constats d’infractions émis ces dernières semaines. Mais ils restent plus difficiles à chiffrer avec précision que ce que suggère le dernier sondage.