Si plusieurs gouvernements, y compris ceux du Canada et du Québec, ne ferment pas la porte à l’idée de faire appel à des applications mobiles pour retracer les gens ayant pu être en contact avec des personnes infectées par le coronavirus – ou ayant elles-mêmes été contaminées –, plusieurs organismes et agences de la protection de la vie privée réclament des balises claires pour éviter que les informations personnelles des utilisateurs risquent de tomber entre de mauvaises mains.
Dans une déclaration transmise par voie de communiqué, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada fait ainsi équipe avec les organisations équivalentes aux paliers provinciaux et municipaux pour « exhorter les gouvernements à s’assurer que les applications (…) respectent les principes essentiels de protection de la vie privée ».
Si les commissaires reconnaissent que « l’urgence de limiter la propagation du virus représente un défi de taille pour les gouvernements et les autorités de santé publique », et que des « mesures exceptionnelles » pourraient être envisagées pour mieux comprendre l’évolution de la COVID-19 et espérer venir éventuellement à bout du coronavirus, notamment l’utilisation d’applications mobiles pour suivre les contacts entre personnes contaminées et personnes saines, ils soutiennent que « ces applications soulèvent d’importants risques en matière de vie privée et de protection des renseignements personnels ».
« Bien que les lois applicables sur la protection des renseignements personnels doivent être respectées, certaines d’entre elles ne prévoient pas un degré de protection adapté à l’environnement numérique », ajoutent-ils dans leur déclaration commune.
Les paliers de gouvernance sont ainsi invités à respecter divers principes: l’utilisation volontaire des applications, histoire de bâtir la confiance du public, ce qui implique aussi la transparence des gouvernements; se conformer aux lois en vigueur; y aller d’une approche « nécessaire et proportionnelle », histoire de réduire au minimum l’atteinte à la vie privée; dépersonnaliser les données pour éviter que les utilisateurs ne puissent être identifiés; appliquer des mesures limitées dans le temps, et prendre leurs responsabilités pour être redevables envers la population, y compris en cas de fuite ou de mauvaise utilisation des informations recueillies.
» Normalement, ce genre d’outil ne devrait pas pouvoir être déployé sans débat public et sans un encadrement juridique correspondant au degré de risque qu’il comporte. Or, nos lois sur la protection des renseignements personnels ne sont pas adaptées au contexte numérique », a par ailleurs mentionné Diane Poitras, présidente de la Commission d’accès à l’information du Québec, qui fait partie des organisations signataires de la déclaration commune.
Pour l’instant, aucun gouvernement, au pays, n’a clairement indiqué qu’il souhaitait aller de l’avant avec ce genre de mesures technologiques. Cette stratégie de traçage a toutefois été largement utilisée en Corée du Sud, par exemple, un pays où la propagation de la pandémie a été largement limitée.