Fort du pouvoir qui est le sien, Google redessine les frontières — tout dépendant de la région du monde où vous vous trouvez. Un pays prétend qu’un territoire est à lui? C’est peut-être ce que les habitants de ce pays verront sur Google Maps.
Par exemple, la région du Cachemire, disputée depuis plus de 70 ans entre l’Inde et le Pakistan —et qui a donné lieu à des affrontements sanglants. Un internaute indien y verra tout simplement le Cachemire comme faisant partie de l’Inde. Un internaute pakistanais —ou du reste du monde— y verra des lignes pointillées, signifiant que la frontière est encore contestée.
Un journaliste du Washington Post a fait ainsi un tour du monde virtuel et surtout, a parlé à différents intervenants — jusqu’à la célèbre National Geographic Society — pour en apprendre davantage sur les pratiques de la cartographie. Il existe même des forums de passionnés des cartes qui documentent les changements — plusieurs d’entre eux, mineurs et pas nécessairement controversés — apportés par Google et ses concurrents, Apple Maps (qui détient 10 à 12% du marché) et Microsoft Bing.
Chez Google, on lui a répondu que « nous restons neutres sur les questions de régions contestées et de frontières », tout en reconnaissant que « dans les pays où nous avons une version locale de Google Maps, nous suivons la législation locale ».
C’est ainsi que la mer du Japon devient, en Corée du Sud, la mer de l’Est. Et que la ligne qui, aux yeux de la communauté internationale, marque la séparation entre le Maroc, au Nord, et le Sahara occidental, au Sud, disparaît si vous consultez Google Maps au Maroc — puisque ce pays considère le Sahara occidental comme étant sien.
Tout aussi épineux est le cas de la péninsule de Crimée, qui fait officiellement partie de l’Ukraine, mais que la Russie a envahi en 2014 et occupe depuis. Sous pression apparente de Moscou, a-t-on appris en novembre dernier, Apple a révisé sa carte (Google avait révisé la sienne dès mars 2019) pour que la Crimée soit vue, si on est en Russie, comme un territoire russe. Le Parlement russe s’est officiellement réjoui de cette décision d’Apple —bien que, pour quiconque se trouve à l’extérieur de la Russie, la Crimée apparaît toujours, sur Google Maps et sur Apple Maps, comme faisant partie de l’Ukraine.