Voilà plusieurs années que les indicateurs économiques sont au jaune, voire au rouge pour la génération dite des milléniaux, soit les gens approximativement nés entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990. Une nouvelle étude du gouvernement américain le confirme: chez l’Oncle Sam, du moins, ces milléniaux sont aux prises avec des conditions économiques moins favorables que celles dont ont profité leurs parents et grands-parents. Une situation qui ne semble pas sur le point de s’améliorer.
Le rapport en question, intitulé Information on the Economic Status of Millennial Households Compared to Previous Generations et produit par le U.S. Government Accountability Office (GAO), l’équivalent américain du Bureau du vérificateur général, a été publié à la fin du mois dernier, et était adressé à l’intention du sénateur du Vermont Bernie Sanders, non seulement candidat à l’investiture démocrate en vue de la présidentielle de novembre prochain, mais aussi membre le plus haut placé au sein du comité sénatorial sur le budget du Congrès américain.
Selon le GAO, qui s’appuie sur trois mesures clés, la mobilité économique est limitée aux États-Unis, particulièrement pour les membres de cette génération. Une recension des diverses études sur la question révèle que la proportion de gens gagnant autant ou plus que leurs parents au même âge est en baisse depuis 40 ans, et que les possibilités d’obtenir une augmentation de salaire significative n’avaient pas augmenté avec le temps.
Enfin, les chercheurs ont constaté que le revenu, à l’âge adulte, était lié au revenu des parents, et qu’entre le tiers et les deux tiers du statut économique est transmis des parents à leurs enfants. Cela est particulièrement vrai chez les groupes aux revenus les plus faibles et les plus élevés. La couleur de la peau et l’emplacement géographique seraient également des facteurs importants lorsque vient le temps de déterminer la mobilité économique d’une personne.
« Les milléniaux vivent des circonstances financières différentes de celles de la Génération X (1965-1981) et des Baby Boomers (1946-1964), et à la lumière d’une mobilité économique sans progression, voire en décroissance, il demeure difficile d’évaluer de quoi sera fait leur avenir sur le plan financier », mentionne le rapport.
À travers le document, les points de comparaison en défaveur de la génération du Millénaire ne manquent pas, y compris la valeur des biens du foyer formé par un couple de représentants de cette génération; cette valeur médiane moyenne est généralement plus faible que chez les « X » ou chez les Boomers. Pire encore, pour les milléniaux moins nantis, la valeur médiane moyenne est largement négative, contrairement à une valeur approchant zéro pour les générations précédentes. Cela signifie que les milléniaux moins nantis sont souvent criblés de dettes, dettes qu’ils peinent généralement à rembourser, ou qu’ils remboursent sur des décennies.
Un contexte différent
C’est peut-être sur cette question de l’endettement que les trajectoires des milléniaux américaines divergent de celles des milléniaux canadiens. Non pas que la même génération ne soit pas endettée ici, particulièrement, par exemple, avec l’achat d’une maison, d’une voiture, ou encore le remboursement d’emprunts destinés à payer les études, mais chez nos voisins du Sud, les études supérieures sont souvent synonymes, si l’on fréquente une école bien classée, de débours de l’ordre de plusieurs dizaines, voire au-delà de 100 000 dollars. Et cela, c’est sans compter les frais de soins de santé, pas toujours couvert par une assurance – qui peut elle aussi être onéreuse.
Ce n’est pas sans surprise, d’ailleurs, que Bernie Sanders se présente comme le candidat des jeunes, et qui souhaite offrir une assurance-santé universelle, à l’instar du Canada, en plus de « faire disparaître » les dettes d’étude, dont le montant total dépasse les 1000 milliards de dollars américains. Les prêts financiers utilisés pour les études sont ainsi un secteur particulièrement convoité de l’industrie de la finance, avec des taux d’intérêts qui sont parfois qualifiés d’usuraires.
« Il est pour l’instant impossible de déterminer comment ces facteurs affecteront les circonstances financières des milléniaux à long terme, y compris lorsque viendra le temps de partir à la retraite », écrit le GAO dans son rapport. Avec une retraite qui devra normalement attendre encore au moins 26 ans plus les milléniaux les plus âgés, la situation peut effectivement changer. Reste à voir si les perspectives économiques des milléniaux iront en s’améliorant.