Sur un terrain de soccer, des jeunes femmes sont à la croisée des chemins. Entre l’adolescence et la vie adulte. Entre l’innocence et l’entrée dans un monde tout à fait réel fait de secrets, de dures vérités et de drames qui surviennent comme ça, pratiquement pour le plaisir. Ces jeunes femmes, ce sont Les louves, dont l’histoire est présentée à l’Espace Go.
Sous la plume de Sarah DeLappe, et avec une traduction de Fanny Britt, voilà donc ces adolescentes presque devenues des adultes qui évoluent sur un terrain de soccer en synthétique. Pour l’occasion, la scène de l’Espace Go a d’ailleurs été transformée pour justement ressembler à l’arrière-salle d’un centre d’entraînement, où nos joueuses, entre divers étirements, échangent sur divers sujets. Sur le cinéma ou la moralité des Khmers rouges, sur l’utilisation d’une serviette sanitaire comparativement à un tampon.
Ici et là, on voit émerger ces grands sujets de discussions, ces enjeux pour « adultes ». L’une d’entre elles s’est-elle vraiment fait avorter? Que dire de l’autre, cette nouvelle, qui habite seule avec sa mère dans une yourte? Et qu’arrivera-t-il si certaines membres de l’équipe, mais pas d’autres, sont sélectionnées par un recruteur pour intégrer une prestigieuse université dans le cadre d’un programme de sports-études? L’esprit d’équipe qui soude ces louves survivra-t-il à toutes ces transformations?
Les louves, c’est bien sûr la maturité qu’il est nécessaire d’acquérir lorsque l’on peut finalement apprendre à conduire, ou encore voter. Tout devient plus réel, plus tangible, plus risqué.
Il y a quelque chose de vrai, à voir ces jeunes comédiennes – peut-être un peu plus âgées que leurs personnages, certes, mais à peine –revivre leur adolescent, leurs doutes, leurs peurs… Une expérience qui a également ravivé certaines incertitudes chez le public, dont la moyenne d’âge était définitivement plus élevée.
Conserver le contexte américain dans lequel se déroule la pièce a cependant ses avantages et ses inconvénients. Avantages, d’abord, parce que l’esprit de compétition peut y être fortement exacerbé, alors que les programmes de sports-études occupent beaucoup plus d’espace qu’ici, lorsque vient le temps de se trouver une université. Ensuite, le contexte migratoire, souligné à plusieurs reprises dans le texte, prend un sens beaucoup plus spécifique, en lien avec les camps de détention de migrants à la frontière entre les États-Unis et le Mexique.
Là où le bât blesse un peu, cependant, c’est que cette mise en contexte impose une certaine distance entre les personnages et les spectateurs. Pour le public, ces enjeux sont un peu plus lointains, un peu moins personnels. Malgré tout, l’idée fonctionne, tout particulièrement lors de la dernière scène où, confrontées à un drame qui a failli faire éclater l’équipe, les joueuses doivent apprendre à vivre les circonstances de la « vraie vie ».
Pièce efficace, pièce touchante, Les louves rappelle qu’il est impossible de stopper l’avancée du temps, et que la vie d’adulte est composée de toutes ces tragédies, petites et grandes, qu’il faudra apprendre à surmonter.
Les louves, de Sarah DeLappe, traduction de Fanny Britt, mise en scène de Solène Paré. Avec Claudia Chan Tak, Claudia Chillis-Rivard, Leïla Donabelle Kaze, Célia Gouin-Arsenault, Dominique Leduc, Stephie Mazunya, Alice Moreault, Noémie O’Farrell, Elisabeth Smith et Zoé Tremblay-Bianco. À l’Espace Go, jusqu’au 6 octobre.
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