Dans son plus récent opus, Robert Littell s’assoit encore une fois sur le choix du narrateur pour donner le ton à son récit. Précédemment, dans Vladimir M., Littel faisait parler, tour à tour, quatre femmes qui ont toutes été l’amante de ce fameux Vladimir. Il offrait ainsi quatre points de vue différents du même homme, avec beaucoup de couleur. Cette fois, dans Koba, paru il y a peu aux Éditions Baker Street, ce sont deux enfants qui prennent la parole.
Le premier, un jeune garçon de 10 ans, raconte ses entretiens avec un personnage, mystérieux pour lui, qui prétend aider le camarade Staline à gouverner. Le second, c’est une jeune fille qui vit cachée avec le jeune garçon et qui commente les propos du garçon qui lui paraissent par trop invraisemblables. En effet, comment serait-il possible qu’un garçon dont la mère a été arrêtée par le régime pour avoir soi-disant comploté pour nuire aux dirigeants du parti, ait pu franchir la barrière des gardes du corps et passe une grande partie de ses journées avec un proche de Staline qui se confie à lui et qui lui offre des glaces autant qu’il en veut.
Mais, au fil du récit, l’amie du jeune garçon se rendra bien compte que, aussi malin soit-il, ce dernier n’est pas en mesure d’inventer tout ce qu’il rapporte. Le contraste entre le climat des entretiens du jeune garçon avec celui qui se fait appeler Koba et le sentiment de peur perpétuelle des enfants qui vivent cachés depuis l’arrestation de leurs parents, n’a d’égal que l’impression très étrange qui se dégage des propos du dictateur qui n’ose pas dire son nom.
Encore une fois, Robert Littell en donne davantage que le lecteur en demande. Il nous offre un suspense qui n’en est pas un, une intrigue bien ficelée, un style très personnel et de nombreux détails sur ce qu’ont pu vivre les populations soumises au joug d’un des plus grands tueurs de masse de l’histoire. Subtile et intense à la fois, Koba saura vous faire frissonner.