Sommes-nous au début d’une nouvelle crise du logement au Québec? Selon Philippe Hurteau, chercheur à lIRIS, l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, le retour à la normale sur le marché locatif après la précédente crise, au début des années 2000, a en fait occulté certains problèmes systémiques qui, inéluctablement, allaient mener à ce qui est qualifié de crise par plusieurs intervenants, mais de simple « rareté » par le gouvernement Legault.
Dans une note d’information publiée jeudi et intitulée Vers une crise permanente du logement, M. Hurteau rappelle que le taux actuel d’inoccupation des logements, au Québec, est de 2,3%, soit en-deçà du taux d’équilibre de 3%. Pour les logements de trois chambres et plus, bien souvent essentiels pour l’installation des familles dans les grands centres, ce taux est beaucoup plus bas, soit 1,5%. Selon l’IRIS, il s’agit ici d’un recul de 2,4 points de pourcentage en seulement deux ans, « qui crée une situation aiguë de pénurie, en plus de générer de véritables problèmes d’abordabilité ».
De leur côté, les loyers, s’ils ont, en moyenne, légèrement diminué ces dernières années, ont tout de même bondi de 9% sur 18 ans, ce qui demeure tout de même sous l’inflation.
Toujours au dire de l’IRIS, en 2017, la part des loyers dans le revenu réel moyen avant impôt des ménages locataires s’établissait à 19,2%, et à 24% pour le revenu médian. Cette proportion continue d’augmenter, note le chercheur, ce qui continue de gruger les sommes disponibles pour tous les autres achats dont doivent s’acquitter les locataires.
Entre autres « responsables » de cette crise latente qui couvait depuis longtemps, on note la lente progression, voire parfois l’arrêt complet des projets de construction de logements sociaux; l’absence de contraintes pour obliger les promoteurs à intégrer des logements sociaux et abordables dans leur offre immobilière; la multiplication des logements utilisés à des fins locatives sur des plateformes comme Airbnb, ce qui les retire du marché, et enfin l’augmentation de la demande en raison, entre autres, de la croissance démographique.
Éviter le pire
L’étude de l’IRIS présente plusieurs recommandations pour éviter que cette crise du logement ne devienne monnaie courante. Ainsi, il est recommandé que les différents paliers de gouvernement agissent promptement pour relancer les programmes de construction déjà en place, mais qui sont parfois tombés dans l’oubli, et qu’ils investissent massivement pour construire de nouveaux logements abordables et à loyer modique.
L’IRIS propose par ailleurs un registre national des baux, sous l’égide de la Régie du logement, qui permettrait de limiter les pressions inflationnistes. À noter que cela est réclamé depuis plusieurs années par divers organismes sociaux, mais que les propriétaires s’y opposent farouchement, plaidant qu’une fixation plus rigide des loyers les empêche d’investir pour rénover les logements, les loyers de ceux-ci étant trop bas pour que les propriétaires puissent ultimement récupérer leur argent.
Enfin, le gouvernement est invité à mettre sur pied une politique permettant aux villes de créer une réserve foncière qui servirait à acquérir des terrains destinés à la construction de logements, histoire de les protéger des « dynamiques spéculatives du marché immobilier ».
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