C’est devant une foule de journalistes emballés que le Cirque du Soleil a présenté mercredi matin un aperçu de la relecture de son classique Alegría. En plus du dévoilement de son impressionnante équipe de créateurs, trois numéros ont aussi été montrés. Nul doute que les spectateurs en auront plein les yeux, les oreilles et le cœur dès le 18 avril.
Quiconque suit le Cirque du Soleil depuis assez longtemps ne peut passer sous silence son association à Alegría, probablement son spectacle le plus emblématique, mais aussi celui qui lui a valu le début significatif de son succès et de sa renommée. Vingt-cinq ans plus tard, l’entreprise se fait plaisir et vient redonner vie à ce classique en lui insufflant un vent de renouveau, histoire de dépayser à la fois les nouveaux spectateurs et ceux qui ont encore le spectacle d’origine tatoué sur le cœur.
C’est un spectacle de cirque, oui, mais c’est également une chanson, inoubliable, et un film, moins mémorable. Toutefois, comment aborder un monstre aussi sacré? Si l’idée, assez folle et inusitée, a d’abord été prise avec des pincettes, et surtout avec le désir de faire plaisir aux fans, tout a pris son sens lorsque tous les créateurs réunis ont finalement eu le désir de réinventer complètement le spectacle tout en conservant son message, son ADN, son esprit.
« En révisant le spectacle d’origine, ce qu’on a découvert, c’est qu’il y avait une part importante accordée à cette volonté de changement, de se provoquer, de se challenger, de viser un vent de renouveau, de semer de l’espoir. Après tout, le terme Alegría vient du mot allégresse, de ce désir de se donner de la force et du courage dans des moments plus difficiles », nous raconte le metteur en scène Jean-Guy Legault.
Ainsi, pas question de refaire simplement le spectacle. Beaucoup a changé depuis et si on s’est lancé dans un travail de fond à dépoussiérer toutes les archives, il était essentiel de laisser cohabiter le passé et le présent, un peu comme le spectacle l’a d’une façon toujours suggéré. Pour Legault, l’idée était claire et limpide: impossible d’aborder une relecture sans la remettre carrément en question.
« Si tu respectes trop une œuvre, tu lui manques de respect, tu n’arrives pas à la rendre intemporelle», nous raconte-t-il. Et c’est ce qu’il veut plus que tout, faire voyager l’œuvre dans le temps en prouvant sa pertinence encore aujourd’hui.
Sa vision, particulièrement précise, n’a pas manqué d’inspirer ses créateurs, comme la scénographe Anne-Séguin Poirier qui a voulu miser sur les nouvelles possibilités technologiques qui n’existaient pas à l’époque. Profiter de la mobilité, de l’espace, de la profondeur, mais surtout de l’éclairage incorporée partout aux limites du possible (la scène s’illumine d’elle-même de façon assez singulière et remarquée), a permis d’offrir une nouvelle dynamique à un spectacle qu’on a malgré tout l’impression de découvrir pour la première fois.
Cet émerveillement est à la base même du Cirque du Soleil, mais, comme le dit Legault, il est aussi dans sa volonté propre, de constamment se dépasser et d’aller plus loin. Cette idée de réappropriation de son époque, c’est probablement la costumière Dominique Lemieux qui s’est retrouvée avec le défi le plus inattendue, elle qui avait créé les costumes mythiques à l’époque. D’abord amusée et honorée, elle a vite compris l’ampleur du défi qui l’attendait. « Cette idée de changement et de renouveau a permis d’apporter une lumières sur ces personnages auxquels les gens s’étaient attachés, mais aussi d’offrir une relecture beaucoup plus en profondeur », nous raconte-t-elle.
Elle s’est d’ailleurs permise de profiter des possibilités d’aujourd’hui pour alléger ses costumes afin de mieux mettre en valeur les corps et l’humain, tout en gardant la base facilement reconnaissable. C’est un peu le même travail que celui de Jean-Phi Goncalves, qui malgré ses nombreuses collaborations avec le Cirque du Soleil, en est ici à son premier spectacle sous chapiteau. Toutefois, sa tâche n’était pas de simplifier les compositions intemporelles de René Dupéré, mais bien de les enrichir.
Il s’est ainsi lancé dans le catalogue original d’une vingtaine de pièces pour leur redonner une nouvelle vie, en parfaite osmose avec le reste de la création. Et si l’évolution musicale est flagrante, à en croire les trois extraits, on reconnaît instantanément les mélodies, que ce soit Querer, Kalandéro ou même Irna pour ce qui est des trois numéros présentés aux médias. À noter que les cinq musiciens qui interpréteront la musique sur scène sont presque essentiellement des femmes, incluant une batteuse, qui risque d’apporter toute une énergie à l’ensemble, ce, excluant bien sûr les deux chanteuses. Certes, ce sera difficile de faire oublier la voix inimitable de Francesca Gagnon, mais gageons que tous auront plus d’un tour dans leur sac pour nous faire frissonner autrement. D’ailleurs, s’il ne peut rien nous dire, Goncalves est particulièrement fier de son travail sur le dernier numéro, qu’il a très hâte de faire découvrir au public.
À quelques jours du début des représentations, l’excitation est plus que palpable et les frissons indéniables face à ce vent de nostalgie qui fait indubitablement du bien. Nul doute, le Cirque du Soleil sait encore comment se réinventer, mais aussi comment satisfaire sans mal, ce que ses cinquante-trois artistes issus de seize pays différents, tout comme le reste de l’équipe, sauront nous démontrer assez rapidement.
Alegría s’amène sous le Grand Chapiteau sur les quais du Vieux-Port de Montréal dès le 18 avril prochain. Trois semaines de supplémentaires ont déjà été annoncées avant que le spectacle se déplace à Gatineau.
Pour tous les détails et pour se procurer des billets, rendez-vous au cirquedusoleil.com/alegria
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