Si on entend régulièrement parler de l’augmentation de la température moyenne de la planète, et du fameux seuil des « deux degrés Celsius », on entend beaucoup moins parler d’un autre seuil, de son petit nom « PPM ». Une mesure qui, de surcroît, est beaucoup plus facile à comprendre que celle des deux degrés, parce qu’elle, elle augmente d’au moins une unité par année.
En 2017, la concentration de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère atteignait en moyenne les 405,5 parties par million (PPM), contre 403,3 PPM en 2016 et 400,1 PPM en 2015.
Ça semble peu, et pourtant, ce sont des seuils qui n’ont jamais été atteints depuis 3 à 5 millions d’années.
Depuis plusieurs milliers d’années, le niveau de CO2 s’était plutôt maintenu à environ 275 PPM. Les carottes de glace recueillies au Groenland et en Antarctique révèlent qu’il a commencé à grimper avec le début de l’ère industrielle au 19e siècle. Et que son augmentation s’accélère au 20e siècle, et surtout dans la deuxième moitié du 20e siècle.
« PPM », autrement dit, est la mesure la plus tangible, quoique la plus méconnue, de l’influence de l’activité humaine sur le climat.
La raison de son importance, c’est qu’on sait depuis un nommé Svante Arrhenius, en 1895, qu’une trop grande quantité de dioxyde de carbone risque d’entraîner un effet de serre sur notre petite planète. Mais à quelle vitesse et à partir de quel seuil ? Les experts de différentes disciplines en débattent depuis des décennies. Dans les années 1990, au milieu des premières négociations internationales sur le climat, on avait fixé arbitrairement 550 PPM comme un seuil de risque : ce chiffre avait été choisi pour une raison purement subjective : 550, c’était le double de 275, le niveau auquel le CO2 s’était longtemps maintenu.
Au début des années 2000, constatant que les calottes glaciaires commençaient à fondre plus vite que prévu, on avait jugé plus prudent de ramener ce chiffre à 450 PPM. L’Union européenne, entre autres, a alors basé ses objectifs de réduction des gaz à effet de serre sur ces 450, vus comme un seuil à ne pas dépasser.
En 2008, jugeant que ce chiffre était encore trop élevé et laissait surtout trop de place à l’incertitude, le climatologue James Hansen et huit de ses collègues proposaient de fixer le « seuil de danger » à 350 PPM: autrement dit, un seuil que nous avions déjà franchi, à la fin des années 1980, et dont la fonte accélérée des calottes polaires, pourrait être la conséquence la plus visible.
Depuis, les calculs se sont multipliés et l’idée qu’il existe non pas « un seuil », mais plusieurs, s’est imposée. Ainsi, les calottes glaciaires peuvent se dérégler plus tôt que les courants océaniques qui eux-mêmes peuvent avoir un seuil de tolérance différent des courants atmosphériques. Mais tout le monde s’entend sur une chose : tout système a son seuil de tolérance, et en l’absence de certitude, l’humanité court un grand danger, avec chaque unité de PPM qui s’ajoute.
Le bilan de 405,5 PPM pour 2017 provient du « bulletin des gaz à effet de serre » de l’Organisation météorologique mondiale, déposé jeudi. On y apprend aussi que les concentrations de deux autres gaz à effet de serre, le méthane et le protoxyde d’azote, continuent elles aussi de croître. Le méthane est à présent deux fois et demie plus abondant dans notre atmosphère qu’avant la révolution industrielle du 19e siècle, et le protoxyde d’azote, 20% plus abondant (pour la moitié il provient de l’industrie, de l’usage intensif d’engrais et de la dégradation des sols).
Plus l’augmentation de ces trois gaz est élevée dans l’atmosphère, et plus ils jouent leur rôle de « gaz à effet de serre », c’est-à-dire emprisonner une partie de la chaleur du soleil sur notre planète — à la manière d’une serre qui emprisonne la chaleur.
Si la tendance se maintient, la Terre dépassera le seuil des 410 PPM dans moins de trois ans, et atteindra les 450 PPM dans moins de 20 ans.
https://www.pieuvre.ca/2018/11/06/environnement-biodiversite-rapport-animaux-disparition/
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