La prochaine grande épidémie pourrait ne pas être seulement causée par un virus, ou par un manque de budget pour combattre ce virus, mais par les fausses nouvelles. « Le déluge d’informations contradictoires, de désinformation et de manipulation de l’information sur les réseaux sociaux, devrait être reconnu comme une menace de santé publique ».
C’est ce qu’écrit l’anthropologue Heidi J. Larson, experte en analyse de risque à l’École de médecine tropicale et d’hygiène de Londres, dans la dernière édition de la revue Nature. Dans ce texte d’opinion, elle souligne son inquiétude face au manque de confiance à l’égard des vaccins, un manque de confiance qui n’avait pas attendu les réseaux sociaux pour prendre racine, mais que ceux-ci ont contribué à diffuser à grande échelle. Larson dirige un groupe international d’experts multidisciplinaires — anthropologie, statistique, épidémiologie, sciences politiques — le Vaccine Confidence Project, qui s’interroge sur des façons de détecter les premiers signes de rumeurs virales à propos des vaccins, avant que ces rumeurs ne fassent boule de neige.
Il se trouve, écrit-elle, que la désinformation à propos des vaccins peut prendre deux formes: la mauvaise information, basée sur des erreurs et des faussetés et la désinformation délibérée, celle qui est fabriquée à seules fins de vendre des livres ou des cures miracles. On peut même intégrer dans cette dernière catégorie une sous catégorie: la désinformation délibérée à des fins opportunistes, et celle-là est bien un phénomène de cette décennie: « … vient de ceux qui voient le débat anti-vaccin comme une opportunité politique, une façon de polariser la société. Plusieurs rapports cette année ont découvert que les trolls et les bots russes ont utilisé un langage émotif, la colère, pour répandre de la désinformation et exacerber les divisions entre ceux qui étaient pour et contre les vaccins. »
Il n’y a pas de solution-miracle, conclut-elle. Les stratégies d’éducation ou de sensibilisation sont valables, mais échouent souvent « parce qu’elles façonnent un message en fonction de ce qu’elles veulent promouvoir, sans se préoccuper des perceptions existantes ». Les stratégies doivent inclure la nécessité « d’écouter et de s’impliquer ». Si une souche de la grippe aussi mortelle que la grippe espagnole de 1918 doit surgir, « et que la réticence des gens à se faire vacciner reste aussi élevée qu’aujourd’hui », cette souche pourrait avoir un vaste terrain de jeu à sa disposition.
Un commentaire
Pingback: De la résistance aux antibiotiques en Antarctique