À une époque où les productions irrévérencieuses gagnent du terrain et que la nostalgie est plus rentable que jamais, la proposition de The Happytime Murders était extrêmement prometteuse en cherchant à virer à l’envers nos souvenirs d’enfance les plus chers. Le résultat souffre toutefois d’un manque flagrant d’efforts qui a tôt fait de nous laisser un très mauvais goût en bouche.
C’est étonnant à dire, mais Brian Henson était probablement la meilleure personne pour s’amuser à pervertir l’univers créé par son père qu’il a lui-même visité à de nombreuses reprises par le biais de plusieurs films et épisodes de téléséries. Maintenant que la franchise des Muppets a eu droit à une excellente relance grâce à la collaboration de James Bobin et Nicolas Stoller, c’était probablement écrit dans le ciel (bien que personne ne l’a vu venir) que le tout aurait droit au traitement Ted.
Mieux encore, bien que le film est assez paresseux dans ses tentatives méta, il s’intéresse quand même à un style cinématographique précis qu’il pastiche, soit le film noir (petite musique jazz ici et là et narration introspective en voix off incluse), liant l’intrigue à une enquête de détective dont les ficelles sont prévisibles au possible. Certes, on est très loin de Who Framed Roger Rabbit, puisque le film n’a aucune ambition.
Pire, produit par Melissa McCarthy et son copain de ville Ben Falcone, le film devient rapidement une production pour sous-utiliser le grand talent de McCarthy (une récurrence dans sa longue filmographie), la mêlant dans une drôle de relation amour-haine entre ex-partenaires s’amusant sur le canevas du cop-buddy movie. Bien sûr, l’étincelante distribution fait ce qu’elle peut avec le matériel qui lui est donné, et surtout le piètre scénario qui se résume sur un coin de serviette, ce qui expliquerait pourquoi, lorsque McCarthy retrouve sa belle complicité avec l’irrésistible Maya Rudolph (utilisée plus tôt cette année dans le surprenant Life of the Party), que le long-métrage donne presque l’impression de décoller. Mais c’est trop peu trop tard, surtout en voyant les pitreries que Elizabeth Banks se retrouve à devoir faire.
Enchaînant sans rythme et face à un profond malaise un nombre incalculable de tristes blagues de très mauvais goût, à caractère foncièrement sexuel, le film donne l’impression qu’on n’a certainement pas voulu mieux exploiter le concept, se disant que l’incongruité inattendue de l’ensemble ferait certainement le boulot.
Le hic, c’est que ce n’est définitivement pas suffisant, alors que les 90 minutes du film en paraissent le double et que l’écoute tourne rapidement en torture. Sans rythme, sans rire, sans intérêt, le film avance sans donner envie qu’on le suive dans son délire plus que contrôlé, faisant en sorte qu’on se désole que l’expertise utilisé pour les marionnettes (elles sont savamment bien mêlées dans le vrai monde ce qui fait qu’on y croit aisément) et le soin apporté à la certaine direction artistique, soit tout simplement en vain.
The Happytime Murders est donc à l’image de la vaste majorité de productions cinématographiques de cette année, ensevelies de fausses bonnes idées qu’on a envoyées en salles avant même de s’assurer que le projet avait été retravaillé encore et encore et encore et encore afin d’en assurer la qualité. Une œuvre marquée, mais trop anonyme, qu’on aura vite envie d’oublier.
3/10
The Happytime Murders prend l’affiche en salles ce vendredi 24 août.
https://www.pieuvre.ca/2018/08/20/sorry-to-bother-you-centre-dappel-en-folie/