Quintessence du mâle alpha, un Autochtone vit de chasse et de pêche pour subvenir aux besoins de sa famille de sept enfants. Projeté dans le cadre de la 28e édition du festival Présence autochtone se déroulant du 7 au 15 août, le documentaire Dirt McComber: Last of the Mohicans de Ryan White et Joanne Storkan suit cet homme à la manière du cinéma direct.
À l’embouchure du lac Saint-Louis, passé le pont Honoré-Mercier, se trouve la réserve autochtone la plus près de Montréal: Kahnawake. «Autour de moi, il y avait beaucoup de problèmes de chômage, je me suis dit que ce serait intéressant juste de le suivre», a affirmé la productrice Joanne Storkan à la suite de la projection dans l’Amphithéâtre de l’Université Concordia. Malgré un découpage en saisons plus ou moins pertinent, la singularité de cet homme nous fait adhérer au film du début à la fin puisqu’il incarne le point de gravitation d’un mode de vie autarcique que l’on ne souhaite pas voir disparaître.
Il nous amène à la pêche. Il attrape un esturgeon dans son filet, lui coupe la tête pour le vider de son sang et l’éventre. Il nous montre les œufs en prenant soin d’en détacher un, affirmant qu’il pourrait vendre ce caviar très cher. Il avale l’œuf et nous indique que ce qui est jaune dans la chair est le gras, cela signifie que le poisson est en santé en plus de donner de la saveur à la viande quand elle cuit. Puis, il nous guide dans son cabanon, là où il transforme sa viande de poisson et de gibier privilégiant le savoir légué par sa mère plutôt que les normes officielles de salubrité. À cette entreprise, s’ajoute un fumoir alimenté de diverses variétés de bois.
«La viande qu’on nous vend en magasin, c’est vide. Ça prend des protéines !», affirme-t-il. À le voir pêcher au harpon dans la rivière, il nous place devant l’évidence qu’il s’agit de la bonne diète pour un tel mode de vie. Ce père de famille tente tant bien que mal d’inculquer cet instinct animal, cet esprit fonceur, à ses fils en les obligeant à jouer à la crosse. Sport autochtone substitut à la guerre, Dirt McComber est un gérant d’estrade agressif. Lorsqu’il montre comment couper les poissons ou dépecer un animal, il interdit de pleurnicher et avertit que ce n’est pas l’endroit pour porter une jupe rose.
Dominant, drôle, certes, l’équipe de tournage garde ses distances par rapport à l’homme néanmoins, en évitant de dresser un portrait idéalisé. Sa femme, ses enfants et quelques personnes de son entourage interviewées expriment les hauts et les bas de son caractère. Alors qu’un contexte spatio-temporel est esquissé pour le dernier des Mohawks. Eric McComber de son vrai nom, a été monteur de structures d’acier dans les grandes villes américaines, sans harnais ni câbles. Pendant la Crise d’Oka en 1990, il était à l’étranger.
Sans désigner l’événement tel quel, le documentaire rapporte un bel exemple d’appropriation culturelle. Une production américaine s’est rendu à Kahnawake pour tourner des scènes de la télésérie Sex and the City version autochtone. Pris au piège, notre héros devait jouer un figurant dans un faux Pow-wow.
Captivant.