À quelques mois des élections, et toujours confortablement installée en tête des sondages, la Coalition avenir Québec (CAQ) a dévoilé cette semaine son plan de « décongestion » de la grande région de Montréal. Au programme: davantage de transports en commun, mais aussi l’élargissement d’autoroutes en banlieue, pour « avantager les familles ».
Dans le document rendu public cette semaine, le ton est donné: « La circulation est infernale dans la grande région de Montréal », assène la CAQ, qui évoque la « diminution de la qualité de vie de nombreuses familles », ainsi que des impacts sur l’économie.
Chiffrant à 1,5 milliard de dollars les pertes économiques engendrées par les retards liés à la circulation et au transport, le parti de François Legault propose une série de mesures visant à accroître la fluidité du trafic et ainsi réduire le temps passé sur les routes.
Les banlieues, d’abord
Grandes régions où la CAQ espère consolider ses positions électorales et gagner de nouveaux sièges lors du scrutin du 1er octobre, les couronnes nord et sud de Montréal sont aux prises avec une offre déficiente en matière de transport en commun. Qu’il s’agisse des stationnements incitatifs bondés dès les petites heures du jour, la réduction draconienne de l’offre de transport la fin de semaine – le gros de la demande est enregistrée aux heures de pointe, la semaine -, ou encore des voies encombrées sur les ponts ou sur les autoroutes, les problèmes ne sont pas récents.
De fait, la CAQ évoque une étude du ministère des Transports datant d’il y a 20 ans, où l’on indiquait que le réseau montréalais était déjà saturé, particulièrement sur la couronne nord. Depuis, les banlieues ont accéléré leur développement, ce qui a fait grimper le nombre de voitures sur les routes, l’offre de transport collectif n’ayant pas crû aussi rapidement que le réseau routier.
Toujours en invoquant le cas des familles, « où il faut aller porter les enfants à la garderie ou à l’école le matin, et où il peut être nécessaire de faire un saut à l’épicerie en fin de journée », la CAQ propose de multiplier les stationnements incitatifs, pour que les banlieusards puissent se passer de leur voiture et prendre le train ou l’autobus en direction de Montréal, pour aller y travailler.
On propose également d’augmenter le nombre de voies réservées sur les boulevards et les autoroutes, bien souvent en élargissant ces dernières, par exemple, plutôt qu’en réduisant le nombre de voies dédiées à la circulation automobile pour forcer un rabattement sur les transports collectifs.
La CAQ suggère par ailleurs de prolonger diverses autoroutes, dont la 19 à Laval, pour effectuer une jonction avec la station de métro Cartier.
L’un des aspects principaux du plan de la CAQ est toutefois le prolongement du Réseau express métropolitain (REM), dont la construction a déjà débuté sur la Rive-Sud. Présentant le réseau de trains électriques automatiques comme « un projet emballant, qui répond à de véritables besoins », la Coalition avenir Québec propose d’étendre la portée du chemin de fer sur 22 kilomètres sur la Rive-Sud, jusqu’à Chambly.
Au nord de Montréal, on avance un autre prolongement, sur une distance de 17 kilomètres vers Laval, cette fois, en plus d’évoquer une expansion future avec l’ajout d’un axe est-ouest sur l’emprise de l’autoroute 440.
Le parti ne chiffre pas ces deux engagements, s’en tenant à affirmer que la Caisse de dépôts et de placements du Québec demeurerait propriétaire du réseau, et que Québec financerait le tout à hauteur de 25%. Un gouvernement caquiste demanderait également l’aide d’Ottawa.
Du tramway dans l’Est
Montréal n’est pas en reste dans le plan de la CAQ, alors que l’on propose de construire un tramway dans l’est de la ville, « parent pauvre au niveau (sic) du transport collectif sur l’île ».
Ledit tramway, qui circulerait de la pointe de l’île au métro Radisson, en passant par la gare de Pointe-aux-Trembles, permettrait d’accélérer les déplacements vers le centre-ville. La CAQ entend réserver 1,8 milliard de dollars pour développer le tout.
La formation politique reprend aussi, à son compte, les engagements en faveur du service rapide par bus sur le boulevard Pie-IX, ainsi que le prolongement du métro sur la ligne bleue vers Anjou, sans en modifier les échéances actuelles, ou en modifier les budgets déjà annoncés.
Pas question, toutefois, d’investir dans l’idée de ligne rose de Projet Montréal et de la mairesse Valérie Plante. « Si la CAQ se rallie à la volonté exprimée par l’administration municipale montréalaise d’investir dans le transport en commun, elle estime que, dans sa forme actuellement embryonnaire, le projet de ce nouveau tronçon n’est pas encore assez développé et présente trop d’incertitude quant au coût pour figurer dans les priorités du gouvernement du Québec », peut-on lire dans le document.
Par ailleurs, la CAQ veut amarrer financement des sociétés de transport en commun et qualité de service, en donnant l’exemple de l’augmentation du nombre de pannes de plus de cinq minutes dans le métro de Montréal depuis 2013. Le parti n’explique toutefois pas, dans son document, que le matériel roulant du métro, vieux d’une quarantaine d’années, est en voie d’être entièrement remplacé par les nouveaux wagons Azur.
Mobilité et simplicité
Parmi les autres mesures proposées par la CAQ, on envisage une « simplification » des tarifs du transport en commun dans la région de Montréal, déplorant que le document de l’Autorité régionale de transport métropolitain qui présente les tarifs pour les différents services fasse 34 pages. On n’offre toutefois aucun détail sur cette éventuelle simplification.
On souhaite également accroître l’accès des personnes handicapées aux réseaux de transport collectif, en imposant, pour les prochains projets, l’embarquement des passagers en fauteuil roulant, des dalles podotactiles, des bandes balisées au sol, ainsi que des signaux à décompte numérique et sonore.
Au total, c’est 10 milliards de dollars qu’un gouvernement caquiste souhaite consacrer aux différentes étapes de ce plan (électrification des transports, amélioration de l’offre de transport collectif, élargissement et prolongement d’autoroutes, transformation de la rue Notre-Dame en boulevard urbain, prolongement du métro, installation d’un tramway) d’ici 2030, date où le parti espère avoir complété l’ensemble des projets.
Le Parti québécois dénonce
Si le Parti libéral n’avait pas réagi au moment d’écrire ces lignes, le Parti québécois, lui, n’a pas perdu de temps pour dénoncer le plan caquiste.
En entrevue avec le Journal de Québec, le porte-parole péquiste en matière de transports, Martin Ouellet, a affirmé que le plan de la CAQ permettait de « faire pire, faire moins ».
«On n’a pas d’objectif de réduction du nombre de véhicules, on n’a pas de réduction du nombre de gaz à effet de serre, on n’a malheureusement aucun cadre financier, on n’a pas d’échéancier», a ajouté le député péquiste, selon ce que rapporte le Journal.
Le parti dirigé par Jean-François Lisée s’interroge également sur la source des 10 milliards de dollars annoncés par la CAQ pour la réalisation de son plan, alors que le Plan québécois des infrastructures atteint déjà les 100 milliards.